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Soyons directs et clairs ! Avec "Venus Parade And More Songs Beyond Love" et la musique de A Singer Must Die , je suis entré en amitié, pour ne pas dire en connivence. N’y voyez pas pour autant une chronique de connivence justement. Là où d’autres en pure opportunité tissent des toiles et réseautent stratégiquement, le "collectif" d’Angers forge une forteresse faite de matériau humain, provoque l’émergence d’une communauté autour de lui...Communauté dont j’espère faire un peu partie.

Ils sont rares ces artistes qui créent du lien social, qui forcent les passerelles entre les gens. Du photographe Jerôme Sevrette, auteur des trés beaux "Commodore" et "Terres Neuves" à l’ami Guillaume Mazel. Du poète des images et du son Dave Le Monocle à Jean-Louis Bergère, combien de sensations communes ressenties, combien d’élans d’enthousiasme partagés !!!!

Ce collectif comme tous les grands groupes procède de la bicéphalie. Rappelez vous Jagger et Richards, Lennon et Mac Cartney, Marr et Morrissey, David et Jonathan...

Il en est de même pour A Singer Must Die avec ses deux Manuel (Bichon et Ferrer) co-compositeurs de l’album.

Il ne faut pas pour autant en oublier la dream team qui les accompagne comme Emilie Buttazoni (Vibraphone/Claviers), Romy Marx (Guitares), Olivier Bucquet (Basse) et Regis Martel (Batterie)... Ils sont de ce matériau, de ce gruau qui fait le meilleur ciment.

Parler de A Singer Must Die, c’est parler de cette musique ambitieuse mais jamais hautaine, c’est parler de ces arrangements riches jamais intimidants et toujours en empathie avec l’humble, c’est s’affranchir du seul original, du seul particulier pour oser le commun qui au final rend unique.... C’est parler mais parler est peut-être vain.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, bien qu’animant une émission de radio et écrivant pour A Découvrir Absolument, je ne pense pas être un homme du langage. Les mots, ces mots sont souvent des remparts, des forteresses pour donner le change, l’illusion de...

Il est plus facile d’interroger l’autre que de se livre soi-même.

Je ne suis pas un taiseux mais je ne suis pas disert quand il s’agit de parler de moi sauf peut-être dans ces particules futiles et inutiles que je lâche parfois dans mes chroniques.

Je ne suis pas de ceux qui crachent sur les réseaux sociaux. Comme nombre d’entre nous, pris par mon travail, ma vie de famille et mon quotidien, ma vie sociale ressemble un peu au Désert de Gobi. Comme peut-être certains d’entre vous, ces instants sur le réseau de Mark Zuckerberg ressemblent à des étapes comme des oasis mais jamais comme des palliatifs à des manques, à des carences.

Je n’ai jamais rencontré Orso Jesenska, Didier Duclos, Mikael Charlot (membres de la Rive), Richard Robert ou Gerald De Oliveira mais malgré cela, je me sens en amitié avec ces relations de l’écrit qui font penser au vieux littéraire que je suis aux correspondances épistolaires d’auteur à auteur au 19ème ou au 20ème siècle. Pour autant, je ne vis pas dans un rapport flou au virtuel et au réel. Je ressens la même chose pour le collectif A Singer Must Die car A Singer Must Die n’est pas un groupe mais un ensemble de personnes constitué de ses membres mais aussi élargi à cette communauté d’anonymes qui les prolongent. N’y voyez rien de démagogique mais il est rare de voir des artistes qui créent ces traits d’union entre leurs prochains sans pour autant tomber dans des postures névrotiques de fan viscéral.

Ils sont rares ces artistes qui provoquent ces envies de création comme le magnifique travail de relecture de "Venus Parade" par Guillaume Mazel. Je crois reconnaître en écho ami les belles choses écrites par Yan Kouton.

Photo : Jerome Sevrette/ Extrait de Teatro Black Parade

"Venus Parade And More Songs Beyond Love" m’accompagne depuis longtemps.. Je l’avais mille fois fantasmé cette musique. Parfois, je l’avais trouvé dans la frénésie laborieuse de la ruche de David Sylvian, dans l’anatomie savante de la mélancolie de Jan Swerts, dans les additions étranges du "3" de Scott Walker, dans la luxuriance harmonique des Blue Nile, dans la richesse sensible de Tonton Ennio. Je l’avais mille fois fantasmé cette musique où l’humanité transpire dans cette mélancolie combative de ceux que la vie a malmené, de deuil en renoncement... Ces gens debout malgré tout qui refusent la petitesse de la plainte. Nulle arrogance chez ces gens là. Juste l’envie de ne pas être que la désespérance mais être multicolore.

Ecouter "Venus Parade And More Songs Beyond Love" me renvoie à ces mots de Jacques Brel, à cette reconnaissance de ses gouffres qui n’empêchent pas la rebellion et le combat.

"Que se lève celui

Qui leur lance la pierre

Ils ne sait de l’amour

Que le verbe s’aimer"

De la douleur qui se tait le soir venu, des élégies qui égrènent leurs charmes, du pouls qui n’ose choisir son rythme, de tout ce qui rôde autour de nous, Les deux Manuel (s) et les nôtres se rêvent en talisman, en marabout protecteur, en trèfles chanceux.

Pourtant, nous sommes tous des Bardamu, des Meursault en quête de nuits plus douces avec cette brise chaude d’été qui nous enveloppe et nous rend invisibles à défaut d’être invincible ("Opening Night").

Entrer dans "Venus Parade And More Songs Beyond Love", c’est comme retrouver la main qui nous connait le mieux, qui sait réveiller en nous cette jouissance du partage.

Entrer dans "Venus Parade And More Songs Beyond Love" c’est comme pénétrer ce corps familier que l’on connait jusqu’au moindre détail le plus intime, c’est comme reconnaître dans la contraction infime d’un muscle ce dialogue, ce vrai dialogue.

Comment retrouver la grâce, l’empathie des premières maladresses ? Cette première caresse gauche ? Comment décomposer ce qui est déjà détruit, dissous ? ("Smoky Mourners")

Car finalement seul ce qui compte ce n’est pas d’être compris, reconnu mais bien plus de comprendre, de reconnaitre en l’autre une complicité généreuse ("Black Limo")

Je me rappelle encore cet ami un soir de Feu de Saint-Jean face au spectacle crépitant de ces flammes dans la nuit sur cette plage de juin. Je me rappelle encore ces mots étranges et son regard perdu dans l’orangé bleu mouvant.

"Tu as vu, Greg, c’est comme des milliers de monde en miniature"....

"Venus Parade And More Songs Beyond Love", c’est comme des milliers de monde en miniature comme autant d’émotions mélées. Energie, fièvre, langueur ("Still Worlds")

La danse m’ennuie, je ne me l’explique pas... A elle toujours, je préférerai la trajectoire des montgolfières. La danse m’ennuie, je ne me l’explique pas, sans doute trop peu d’intérêt à mon corps que je délaisse, sans doute la faute à trop d’inertie de ce corps trop lourd, comme une gangue qui cache le vilain insecte. La danse m’ennuie dans la sérénité de ses mouvements, dans la volontaire grâce qui me rend jaloux comme un enfant irrité.

Pourtant même les squelettes et les morts peuvent danser ("The Sordid Tango")

La musique de A Singer n’est ni citadine, ni pastorale ni éthérée. Elle est tout cela à la fois et encore bien plus ("Fell Foot Wood")

Elle est de ces heures exquises, paradoxaux intermédiaires, ces heures bleues où le ciel n’est pas encore tout à fait bleu, plus tout à fait noir. Il n’est pas encore embrasé, nos yeux cherchent encore à s’accommoder aux lignes d’horizon qui affleurent le haut des collines ("By The Dawn Of Monday")

Travaillant de nuit, c’est chaque jour que j’assiste à ces heures là, tenant parfois dans ma main cette vie qui s’éteint, ce regard qui se brouille... Dans ces instants-là, nous partageons avec cet autre, cet inconnu pour une fois, une dernière fois reconnu...

Chaque individu n’est finalement qu’une forteresse qui craint l’état de siège à chaque instant, chaque individu n’est que l’addition de ses doutes et de ses renoncements....

Une forteresse c’est aussi une barrière, une barricade dont le mortier serait la frilosité, le cynisme, une volonté d’uniformisation, la peur de la nouveauté...

Photo : Jerome Sevrette/ Extrait de Teatro Black Parade

Evoquer la musique de A Singer Must Die, c’est devenir impression fugitive de ces instants comme un ralenti sans enjeu, comme un objectif enfin atteint, comme le pèlerin et son œil exercé qui attend Saint-Jacques, comme le couteau qui élargit la plaie ("The Majestic Walk")

Vous revoyez ce regard enjoué de l’enfant qui découvre ses cadeaux au pied du sapin, ce gamin que vous étiez avant les sales ruptures ("Christmas Will Never Be As It Was")

Car l’enfance, ses souvenirs idéalisées, on y revient toujours...

Car on aimerait revenir à ces errances dans des flaques d’eau que d’étranges créatures habitaient, multitudes tranquilles.

Pourquoi notre vie ne pourrait connaître des répétitions générales, des grandes premières ?

Pourquoi n’avons nous pas de gomme magique qui d’un trait effacerait tous les défauts, tous les regrets ?

Pourquoi ne pouvons-nous revivre cette belle journée à l’infini pour enfin la rendre parfaite ?

Pourquoi ne pouvons-nous pas revivre en arrière sur nos chemins, nos impasses ? ("As If We Could Make Unique Things Twice")

Car on ne peut non plus échapper à notre avenir.

Car on aimerait se perdre dans l’oubli, ce pont qui enjambe des néants accueillants...

Car on aimerait être reflet, ombre, onde, vent, murmure, silence mais on n’est que soi, une carcasse, une piètre errance ...

Pourquoi faut-il toujours abandonner ? Pourquoi tout mène au grand abandon ?

Pourquoi ne parvient-on jamais à choisir entre cette main droite qui se tend et celle de gauche qui caresse ("A Right Arm Beyond Love")

A nous je préférerai toujours l’absent

A nous toujours je préférerai le rythme serein de la marée et des ondes qui nous érodent...

A nous toujours je préférerai le chant des herbes folles dans les landes des roches noires....

A nous toujours je préférerai le ciel de l’ouest...

Car ce qui compte ce qui prime c’est de se taire.... C’est le silence.... Evoquer....

Photo : Jerome Sevrette/ Extrait de Teatro Black Parade

De toutes ces croyances qui ont la vie dure, une seule reste immuable... Nous n’obtenons jamais ce que nous voulons...

Il faudra désormais y ajouter une autre, nous retournerons à Venus Parade comme nous retournons aux vieux murs de la maison de notre enfance, à l’abri de cette forteresse de souvenirs et de défilement des années et des visages aimés....

Nul besoin de tenue de circonstance ni de parade, ces chansons, ce duo, ce collectif, ces musiciens sont des nôtres, des intimes, des êtres chers...

Evoquer A Singer Must Die, c’est évoquer cette communauté qui les entoure et les soutient.Qu’ont en commun ces gens-là, peut-être ce rapport sensible aux autres et au monde qui les entoure...

Photo : Lucie Inland

Evoquer A Singer Must Die, c’est à coup sûr parler de Jerôme Sevrette, ce talentueux photographe de Rennes, auteur de pochettes pour And Also The Trees et A Singer Must Die, mais aussi avec son travail ambitieux ("Terres Neuves", "Commodore")....

Voici les mots de l’ami d’images :

Même si je connais depuis quelques temps les 7 premiers morceaux du disque, cette version augmentée de 5 nouveaux titres de Venus parade est pour moi une redécouverte totale de la musique de A Singer Must Die. Dès les premières notes du disque, les manettes de Ian Caple redessinent les ambiances sonores de cette nouvelle mouture, un album qui sonne comme un classique de la pop (française) anglaise.

Les compositions précieuses et préservées de tout phénomène de mode, renforcées par un sens de la mélodie sans pareil, nous rappelle à quel point ce groupe est unique et ce disque à part. Plus qu’un style, leur musique est une identité.

Au fil des titres, on s’imagine facilement dans un road-movie parsemé de paysages et de personnages étranges & romantiques…

Les nouvelles compositions prolongent le voyage dans ces contrées pop, que ce soit sur une moto ou à bord d’une vielle Jaguar décapotable, on se laisse embarquer sans résistance au gré des mélodies & des mots…

Au fil de mes rencontres avec le groupe, j’ai vu les évolutions, leur musique a vite dépassé les frontières des pays de la Loire pour rayonner bien au-delà et afficher une stature internationale, le monde les attend.

A Singer Must Die fait parti de ces groupes & artistes avec lesquels l’échange artistique a toujours été des plus enrichissants. Pour la conception de l’univers visuel du disque, à l’image de leur musique, j’ai fait appel à mes souvenirs photographiques en travaillant pour la première fois sur la base de photos argentiques noir et blanc prises au milieu des années 90.

J’ai tout de suite fait le rapprochement entre ce passé proche, la brit-pop des années 90 et la musique de A Singer Must Die, comme un retour à une certaines esthétique visuelle et sonore, une marque de fabrique au service d’une identité forte et personnelle.

Ceci étant, ce disque par ces qualités d’écritures évite l’écueil des clichés revival 90 & autres décongélations sonores, nous ne sommes pas dans le vintage mais bien dans une classieuse modernité musicale dont A Singer Must Die a fait et avec virtuosité, sa spécialité. "

Evoquer A Singer Must Die, c’est parler d’envie de partager des sensations, de conter une histoire qui nous parle de nous... Qui peut mieux traduire cela que Veronique Sauger, animatrice de la passionnante émission "Les Contes Du Jour Et De La Nuit" sur France Musique qui tout en sensualité et en bel esprit nous transporte ailleurs :

Photo : véronique sauger ©davidAz

En 2013 apparaissait dans mon ciel la planète Manuel Ferrer. La musique de Manuel Ferrer est emblématique d’un 21ème siècle à la croisée de ses univers sonores en pleine mutation, nourris autant de la signature sonore des studios Abbey Road que de la voix rauque d’un Bashung sur un lit d’accords alliant l’harmonie voyageuse d’Einaudi à des mélodies subversives "à la Kurt Weill". Ce qui n’appartient qu’à Manuel Ferrer, c’est l’étonnante sobriété du style, légende impressionniste et classe d’un film n&b ou western d’un monde perdu chantant le sentiment d’une fatalité. C’est rare, cette génération de chanteurs ne croyait plus à ce son simple et pourtant ciselé jusqu’à imposer une identité dès le 1er accord lancé. Alors ? Le roi est mort, vive le roi ! A Singer Must Die, A Singer Must Live ! C’est ainsi que yeux fixés sur la ligne d’horizon brisée par une immense berline, Manuel Ferrer chante. Pour ne plus jamais être sans espoir. Pour encore grandir, grandir, grandir...

Evoquer A Singer Must Die, c’est parler d’une envie de mots, d’une rencontre entre le rythme et le sens.... Jean-Louis Bergère, homme de sons, de notes et de mots était le passeur idéal pour investir ce champ là :

Photo : Michel Durigneux

Fin de concert. La scène retombe dans la pénombre… en remontant l’escalier qui débouche sur la nuit chaude de la rue, et tout imprégné encore des dernières vibrations, des derniers frémissements, on comprend mieux alors… C’est plus clair, plus net, plus évident encore… la musique de A Singer Must Die est pleinement et véritablement une musique à paysages. Une musique qui vous traverse, aérienne, panoramique, enveloppante. Constituée d’innombrables panoramas. Une musique soignée, exigeante qui ne laisse rien paraître de ses architectures parfois complexes, et toujours extrêmement travaillées. Nouvel opus, "Venus Parade And More Songs Beyond Love" est un album savant qui n’en a pas l’air. Et c’est déjà là toute sa réussite. Toute sa beauté. On n’y entend que du feu…

La musique de A Singer Must Die s’inscrit d’emblée dans cette grande tradition de la pop par la qualité intrinsèque de ses harmonies, et de cette superbe ligne mélodique qui s’en détache. Celle qui vous saisit immédiatement et vous entête encore, un paquet de jours à suivre. Celle qui fera de la pop song des premières heures, la pop music commerciale et marchande des Beatles, Bowie, Oasis, Elliot Smith... Mais si "Venus Parade And More Songs Beyond Love" est un pur album pop, il ne s’inscrit pas pour autant dans cette qualification « légère » du genre. Une musique populaire et consommable à fredonner sous la douche…

"Venus Parade And More Songs Beyond Love" est une toile de maître. Un tableau sonore immédiat et compact qui s’impose. Vous saute aux oreilles. D’un seul bloc. Une pièce de tissu soyeux aux mille fibres entrelacées. Avec une palette infinie de couleurs et de nuances. D’ingrédients judicieusement choisis. De particules fines et rares. Le chant rond de Manuel Ferrer, fluide et pourtant secrètement enrichi d’inflexions subtiles, délicates. Les somptueuses guitares de Manuel Bichon et Romy Marx, l’assise sobre, efficace de Régis Martel (batterie) et Olivier Bucquet (basse) et les sublimes ornementations d’Emilie Buttazzoni (vibraharp). Sans parler des très belles mises en place vocales, des chœurs, du sax et des ajouts percussifs et synthétiques, distillés avec la plus grande pertinence. Oui "Venus Parade And More Songs Beyond Love" est un album savant qui n’en a pas l’air. Car à travers ce travail d’écriture, d’arrangement précis, soigné, c’est tout l’espace sonore qui se redéfinit dans une seule et même enveloppe. Une enveloppe large, et extraordinairement sensible.

Oui "Venus Parade And More Songs Beyond Love" est un album savant qui n’en a pas l’air. Et contrairement à ce que l’on pourrait raisonnablement estimer, avec cette difficulté de traduire sur scène une telle réalisation discographique, c’est aussi en live que "Venus Parade And More Songs Beyond Love" déploie et révèle toutes ses lignes de force, toutes ses composantes rythmiques et harmoniques et toutes ses ramifications secrètes.

Et c’est là aussi dans le mouvement des ombres, dans la chair même de l’air, qu’il nous donne à voir, à entendre et à partager toute sa dimension lyrique."

Evoquer la musique de A Singer Must Die, c’est parler de leur enthousiasme, c’est parler de leur lumière.... Je retrouve cette méme lumière chez Dave Le Monocle qui chaque semaine m’offre le beau cadeau de ses chroniques pour notre émission de radio Le Cabinet Des Curiosités, voici donc ses impressions :

Photo : Dave Le Monocle

"Sont-ce les arrangements de première classe, les voix mêlées qui ouvrent ces paysages lunaires soudainement habités ? Happés, appelés, harponnés de face, voilà que débarque le somptueux album Venus parade de la troupe angevine A Singer Must Die (une manière détournée d’un tribute au père Cohen et à ses mots à la trempe évocatrice).

On pourrait penser à Suede, aux Smiths, à Aztec Camera (The Fortress) pour les guitares et les mises en bouche, à REM pour l’atmosphérique "As if we could make unique things twice" (long à dire, bon, rien à re-dire), à Neil Hannon pour les arrangements faux-amis qui prêtent à penser que le hamac est offert avant de se retourner comme une vieille connaissance pour vous conter du haut d’une falaise ses histoires, nos histoires. Certains connaissent le Val sans retour ; regardez par-dessus, juste un peu plus loin. Les flèches décochées ici possèdent la force tranquille de celles gravées dans les chênes partis pour durer, à faire même pleurer des armées de bûcherons.

Venus Parade est l’un de ces pièges amoureux qui ne se referme pas, qui vous laisse le champ libre tout en revenant vers vous avec des bonus sur un plateau pour finir de vous achever « More songs beyond love » avec entre autres Il ne restait qu’à explorer cette somme de titres en concert. La Boule Noire à Paris (mai 2014) a été un point d’ancrage pour certains d’entre nous, à la fois la découverte d’une présence révélée quelques mois plus tôt sur les ondes des réseaux sociaux, ainsi que l’accueil d’une nouvelle famille réduite à un trio pour l’occasion révélant un répertoire maîtrisé mais généreux, une émotion palpable et un plaisir contaminant ; le public s’est souvenu qu’il avait des mains et qu’une première partie pouvait être une grande surprise, à saluer comme il se doit."

Evoquer la musique de A Singer Must Die, c’est convoquer la générosité solaire de Guillaume Mazel, sa poésie chaleureuse :

Photo : Guillaume Mazel

"Les chansons au.delà de l’amour J’aurai des mots à en crever des dictionnaires, j’aurai des images que milles vies n’auraient le temps de voir, pour chacun de ces sons, pour chacune de ces lettres, pour les poser sur des écrans intimes, je n’aurais assez de numéros sur ces horloges, il faudra voyager dans le temps de ces chansons. J’écrirai bercé des proses étincelantes de scènes cinématiques aussi variées que toutes les aubes de l’humanité, je l’ai fait, je le referai, parce que chaque scintillement presque inaudible de ce groupe est une biographie de paysages, l’empreinte d’une histoire. Sur Venus parade j’ai dessiné en consonne d’encre et voyelle d’âme des road movies sur fond de déserts, sur devant glacial, mais sur ces chansons d’un au-delà de tout, des vies et départs, des absences et espoirs, sur ces vibrations, je n’avais encore dit que des débuts de pages, des vastes blancs encore vierge, que petit a petit, de frêles aquarelles vinrent tacher de légendes et panoramiques, des lueurs d’idées, bientôt chevauchées dantesques. Désormais j’ai l’encyclopédie des aventures, l’atlas a rallonge des lieux existant, des lieux qui devront exister, et ceux qui n’existeront jamais, mais qu’on nomme, des cowboys solitaires amoureux des choses disparues aux pieds des sapins habillés, des princesses qui s’auto-lesionnent dans leurs forteresses gonflables question de ne pas sentir le froid, des regrets souffrant d’amnésies qui effacent les promenades des veines, et des adieux posthumes aux pères et gestes d’avant, aux mots innés et a ceux qui ont pour échos sept vies de chats, des retours en arrière chassant des nostalgies sauvages dans les bois des océans, et le tout, fantastiques épopées qui jugent nos petits jours a jours banals. Dans l’épilogue de Venus, les intimités se prononcent plus clairement, dans l’envie de mener plus loin encore tous ces chars de défilé, des dedans plus définis, des alentours plus craint, des mots aux angles plus aigus, dans cet art du contraste, les mensonges se cachent moins, et les vérités se montrent plus encore, et demain, les gris domineront les doutes des maux, et résigneront sur les clameurs de ces soleils d’au-delà de l’amour."

Evoquer la musique de A Singer Must Die, c’est bien entendu parler d’échanges, de collaboration et d’admiration... Est-il encore nécessaire de présenter Ian Caple ? Producteur des Tindersticks, de Bashung et bien d’autres.... Cet homme là a inscrit sa patte inimitable sur à peu de choses prés tous les albums qui comptent viscéralement pour chacun d’entre nous....

Immédiatement enthousiaste à ma proposition de participer à une chronique sur "Venus Parade" qu’il a d’ailleurs mixé, c’est avec une infinie gentillesse qu’il m’a transmis ces quelques mots :

"J’ai toujours aimé cette frénésie de l’ambition et de l’aventure que quelques groupes avaient en eux dans les années 80 et 90. Ces groupes avaient cette vision simple mais généreuse de prendre une simple Pop song (n’y voyez rien de péjoratif) et de l’enrichir, de la grandir avec des grands orchestrations et des symphonies de poche en poussant les limites de leurs possibilités. Echo & the Bunnymen et son "Ocean Rain" , the Pale Fountains,et plus tard les Tindersticks et the Divine Comedy. ils avaient tous cet esprit. Quand j’ai entendu pour la première fois la musique des deux Manuel, j’ai su que cet esprit bougeait encore, qu’il vivait encore...."

Avant de se quitter, un grand merci à l’ensemble des participants pour leur immédiate implication dans l’initiative.Un grand merci à d’autres absents de cette chronique mais forcément à nos côtés, je pense à Kramies Windt et à Sutties Lea... L’album est déjà disponible sur toutes les plate-formes et sera disponible en cd à la rentrée le 08 septembre.

Pour ceux qui voudraient découvrir le travail de Jerome Sevrette (comme par exemple son Teatro Black Parade) et pourquoi pas faire appel à ses services talentueux, une seule adresse :

http://photographique.fr/

Amateur de radio, je ne peux que vous conseiller l’excellente émission de Veronique Sauger sur France Musique, Les contes du jour et de la nuit à découvrir ici :

http://www.francemusique.fr/emission/contes-du-jour-et-de-la-nuit

Le travail délicat et beau de Jean-Louis Bergère est à découvrir ici :

https://www.facebook.com/jeanlouis.bergere

Les belles émotions de Dave Le Monocle sont à retrouver chaque semaine le samedi soir entre 21h00 et 23h00 sur Radio U dans Le Cabinet Des Curiosités mais aussi sur ses sites ici :

www.lemonocledemononcle.weebly.com

www.planetepliante.weebly.com

Je ne peux que vous conseiller la lecture des belles chroniques du solaire Guillaume Mazel et peut-être cette relecture de "Venus Parade And More Songs Beyond Love" ici :

http://adecouvrirabsolument.com/spip.php?article4520

Pour redécouvrir l’apport de Ian Caple à la musique que nous aimons, retournez écouter vos Tindersticks et bien d’autres encore

https://soundcloud.com/asingermustdie