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Pour les amoureux de l’étrange, de l’abstrait, du bizarre, une étoile particulière s’est mise à briller chez Constellation avec les premiers enregistrements solos d’Eric Chenaux. Car le bonhomme se plait à chercher des timbres libres, des « accents inconnus à la Terre », à travers son jeu ouvert de guitare, déconstruit, pas toujours très harmonique, par moments franchement bordélique ; l’impression d’une jam cosmico-folk, d’une musique pâte-à-modeler pleine d’humour, de notion de jeu, d’amour spatial aussi. Où les grincements, les éclats de nylon, ou électriques, orbitent sur des orbites qui rarement se coordonnent avec une voix voyageuse.

Chenaux joue ainsi de plein de manières avec sa guitare, de la sourdine, du wah-wah, mais surtout des trames, des trames de rêves, de langueur vivifiante, ou lénifiante selon l’humeur. Ce sont un tas de pédales, et des cordes, et des cordes qui forment des paysages brouillés, flous et douillets ; des genres de plages d’échos infinis, dans des ronflements de guitare désaccordée, improvisée, inconventionnels.

Et en supplément de ces tons qu’on ne pensait jamais entendre sortir d’une guitare, la guitare d’Eric se perd de même, tient bon sur l’océan de décomposition des guitares, guitares crépues, guitares gloussantes. Une sorte de maelstrom minimaliste au milieu duquel le capitaine Chenaux tient la barre un peu leste, laissant la voile déborder à droite, à gauche, en susurrant ses chants d’Amour (« An Abandoned Rose » plein de spleen et de voix noyée, « There’s Our Love » foutrarque, éraillé, où la voix au contraire est claire et assurée, se perdant en minaudant de façon merveilleuse). Un disque d’apnée sourde aux remous berçant, dans lequel la guitare évoque plus que trace, à grand renforts de sursauts de plein de cordes successives, limite freak-folk, rappelant les glissements qui se perdaient parfois chez Richard Dawson, avant de venir gratter bien plus lentement la guitare, en arpèges aériennes ou aqueuses, pleines d’éther, de splendeur apaisée et de transe zen.

Ce sont un peu toutes ces impressions que provoque Slowly Paradise ; on nous berce, on nous surprend, on nous tient la main pour nous conduire dans quelque chose de duveteux, de jamais-vu ; Eric Chenaux sert un peu d’ange gardien à travers ce Paradis intime, instinctif, de drones comme du coton, où l’on se perd sans peur du piège, car « All is full of love ». D’un amour trifouillé par Eric, d’un amour plein de vibrations imprévues, de reflets et de brume, mais plein d’amour tout de même.




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