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Beau parcours que celui de Cvantez. Après un premier album « artisanal » qui divulguait déjà une passion pour l’indie-rock 90’s (Yvettela Musipontaine), puis un second se frottant à la langue anglaise (Tigers), les Parisiens, avec Lozère, sautent les étapes et accouchent… d’une merveille !

Pour qui connaît la musique de Cvantez, ce nouvel opus transcende les précédentes livraisons afin d’en offrir une somme complète, plus aboutie, plus immédiate. Le groupe réussit là, tout en naturel, un alliage bluffant entre la pensée pop-rock et le goût du contemplatif. Car si les morceaux de Lozère regorgent de grattes XXL (dans une production qui pourrait évoquer le Rather Ripped de Sonic Youth) et de très délicats emprunts cold-wave, l’état d’esprit est au songe, à l’atmosphérique. Les pics, les sursauts sismiques restent canalisés, intériorisés, pour mieux dévier vers une musique réconfortante. Cvantez est une formation qui n’entend guère déstabiliser par l’oppression sonore ou la hargne révélée. Au contraire : le perfectionnisme exprimé par le trio à l’égard de toute création musicale lui permet d’enregistrer un album mélomane mais proche d’autrui, un album qui cherche à faire du bien sans ne jamais tendre vers le minimalisme. Lozère est un (grand) disque de rock qui adoucit l’ambiance – comme si les équations mathématiques se traduisaient dorénavant en poésie.

Délaissant l’anglais de Tigers pour à nouveau se frotter aux mots d’ici, Cyrielle Martin (au chant) apporte énormément à cette sensation de rêverie planante, de comptines pop qui enlacent et susurrent des images flottantes. Certaines phrases se perdent dans le mix, l’auditeur agrippe des mots plus qu’il ne perçoit le sens global des titres. C’est une qualité : la voix de Cyrielle (une bénédiction à mi-chemin entre Françoiz Breut et Kim Gordon), par son refus d’expliciter ce qui n’est que paysages ("L’oubli des collines", "Hauts plateaux", "Bec de pic-vert kiss"), invite à une randonnée picturale dont chacun décidera du propre trajet à suivre. Cvantez propose une destination, mais le carnet de route appartient à tous.