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Les essais de poésie chantée ont souvent frisé la banqueroute. Les mots ne trouvant pas de compagnon à leur auteur, ou l’inverse la musique portant des textes plats, de la poésie de poème étudiante. Et puis il y a aura eu ces mots « des champs, de l’eau, Chicago », prouesse loin de l’abstraction souvent de mise, comme si l’image avait un relief véritable ici. Il y a une voix, il y a une musique, il y a ces mots, tout à la même hauteur, à un sommet. Les trois se combinent, vivant une vie miraculeuse. « Des champs, de l’eau, Chicago », toujours, puis « une couleur, une profondeur » et une remontée en apnée après une chute sévère mais grandiose. Les guitares sont lointaines, elles poétisent aussi, grâce à l’écho, puis elles reviennent de ce voyage (A Silent Effort). On croyait à du post rock, non rien, c’est au dessus, pas de post, pas de pré, juste vivant là devant nous, face à nous, la présence se suffisant, la beauté elle est la formule de politesse. On reste sans voix (Matin) on s’interroge, mais au final on pense à tout sauf à partir, « des champs, de l’eau, Chicago » on ne quitte pas. Même les scories électroniques poétisent, elles sortent de chez Labradford pour nous dire que « tout n’est pas doux », tout non, sauf Louisville. La marge avec l’interrogation permet de ne pas se noyer définitivement et de ne jamais revenir, mais on voyage, une mantra dépoussiérant une place pas nette. Et la poésie explose (The Only Thing To Come Now Is The Sea) la modernité. La modernité n’est pas vulgaire, elle semble juste nous éloigner de la poésie, alors Louisville change la modernité, et assèche les batteries. Depuis l’énumération introductive on ne regarde plus le temps tourner, du coup il tourne quand même, mais sans nous, en apesanteur comme avec « Soiré. Rien ne se fige, tout est en vie, et Louisville semble déserté par la mort. Il ne manque plus que le bruit du retour de chariot pour être dans l’histoire du cinéma de Godard, mais ici on parle musique, et probablement du meilleure de ces vingt dernières années, et de l’émergence d’une scène allant de Will Oldham à Slint en passant par Tortoise ou david Grubbs. Les lieux sont impressionnants, et la description n’est presque qu’anecdotique, « Des champs, de l’eau, Chicago ». La roche est brute, l’eau est froide, la végétation est abondante, on ne pense plus, on ne dessine pas, on s’impressionne d’autant de persuasion. Attention à « Forest (for Maria Kotalska), ce texte est d’une puissance inégalée, la réalité comme un coup en pleine face, mais inutile, les larmes avaient déjà coulé. Tout fini en chanson, autour d’une peinte, dans un saloon, dans une twin peaks habité par Calexico, tout fini, sans vraiment se terminer, car la poésie et la musique, dansent ensemble à Louisville, oui à Louiseville, « Des champs, de l’eau, Chicago ». Subjuguant.




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