Soyons honnêtes, s’il n’y avait pas le dérèglement climatique, une pandémie, la guerre en Ukraine, l’inflation, la montée de l’extrême droite, un nouveau disque de Patrick Bruel........enfin si tout allait bien, ce troisième album de Bear’s Towers me serait passé au-dessus, et je serais à cet instant plongé dans les premières démos de Bill Callahan, car trop de bonheur ce serait trop.

Mais le fait est, si certains pensaient que l’histoire était terminée (qu’ils reprennent leurs grimoires) les deux dernières décennies viennent de rallumer le feu, et pas pour le meilleur. Heureusement pour nous est arrivé « Self Portrait » qui après « KYMA » en 2018 et le EP « Prisme » en 2020, devrait placer le quatuor en tête des groupes de pop rock français pendant que Talisco semble en sommeil. Heureusement oui, car plutôt que de s’apitoyer sur leur sort, les quatre membres du groupe ont décidé de nous constituer un GPS vers le bonheur, par des chemins de traverse souvent mouvementés, mais toujours avec à l’horizon le feu sacré de l’espoir. Porté par le chant doucement éraillé d’Aurélien (autre point de convergence avec Jérôme Amandi), Bear’s Towers nous offrent une pop rock teinté de folk habité par l’envie de mettre de la couleur dans nos vies, sans jamais se départir d’une mélancolie évidente . Sans tomber dans la naïveté benoîte et commerciale d’un Coldplay cul cul la praline et grotesque, le groupe lorgne avec les hymnes pour stades, quand ceux-ci ne sont pas occupés par des abrutis qui se tapent dessus. On pourra penser aussi au U2 post la sainte trilogie Achtung/Zooropa/Pop ( « Say Something » entre autres), inscrivant dans une lignée de groupe que nous défendons rarement ici, mais quand le couteau semble à ce point proche de notre gorge, il est vital de pouvoir se servir de celle-ci avec puissance et envie afin de contrer la lame. Un disque qui vous veut du bien.