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"On a fait avec nos moyens". Ainsi commence ce petit dialogue, en fait non, quelques temps auparavant, les Twin Oaks m’avaient fait passer un petit thème a eux, qui m’avait plu, pas encore la chair de poule qui me sert d’essence pour démarrer, mais un certain plaisir, ces tonalités acoustiques, ce son de blues rupestre, ni folk, ni blues, de ces trucs que devaient chanter Tom Petty ou Dylan a la tombée du soir sous le porche de leurs cabanes de bois, gratté a la guitare usée, dans cette sorte d’intimité que crée le "chez-soi", le "personne n’écoute, laisse-toi aller". C’est alors a la seconde touche que le pécheur a ferré le poisson, lors d’un dialogue juste un peu plus long, les réseaux ne sont pas fait pour de longues mélopées, et l’envoi, sous ce "On a fait avec nos moyens", de onze titres home-made, que le poil s’est hérissé, que le corps s’est accommodé un peu plus relax dans le sofa du salon (je note parfois le plaisir d’écoute par la sensation de peser plus ou moins sur les coussins, quand le corps est une masse mole et quasi liquide, c’est l’orgasme auditif). "On a fait avec nos moyens" et c’est tout, c’est pas rien, et c’est très bien, messieurs, il peut y avoir autant de plaisir sur une seule piste que sur des tables de mixage a 80 ou plus, le plaisir, c’est bien connu, ne se mesure en numéros, sinon au temps passé a nous en souvenir, et il sera toujours bon de réécouter ces titres là, comme il m’est, en contraste, aussi bon d’écouter le travail de chinois de Rats de studios et samplers. Alors l’artisanat sonore pour commencer a parler d’eux, comme base. Parce que l’artisanat a ce don inné d’être ouvert aux petits accidents, aux trouvailles hasardeuses, a cet effet de voix qui sale ou sucre, un manque d’air, un chat dans la gorge, le fait maison implique dans sa logique du chacun et du soi-même qu’une corde de guitare ait pour la même note deux mimiques opposées, qui ne tombent pas toujours a point, mais qui sans le vouloir, donne une vie extra aux chansons. Twin oaks est fait de ces petits accrochages de leurs vécus, et font dans l’artisanat d’orfèvre, dans le calme parfois triste de leurs mélodies folks presque spontanées, que l’on sent, à peine terminées les chansons, encore chaudes sous l’oreille, comme récemment exprimées du citron, jus doux-acide, liquide déposé sur la production sèche de leurs sonorités. Twin Oaks est un recoin de Missouri où nos petits apprentis de manualités sonores, le typique recoin ricain, son église Twin Oaks, son resto de nachos Twin oaks, sa casse Twin Oaks, un de ces folklorique village où tous ont appris à faire leurs vies avec leurs deux petites mains, de père en fils, tous se connaissent, de la church au Saloon, et tous savent sourire fait-maison. Il y a de cet esprit dans ce duo Lillois (quelque part aux deltas d’un fleuve américain bluesy), les petits plaisirs d’un recoin, d’éviter le plastique, d’éviter la voix trafiquée, Thomas Boute et Vincent Bartier ont des noms de partout, de forges et de champs, de ruelles de villages et orées de bois, des noms de vous et moi, de ceux que vraiment respirent, sautent, vivent, se tachent aux repas et s’illuminent aux instruments. Et dont l’intelligence est de proclamer que leur folk est a la limite du blues et est grunge entendez-moi dans la logique du son, grunge est tout ce qui est cru, inaltéré, inné, raclant, impoli (pas de mauvaise éducation, mais pas lisse), et quand le naturel du folk rencontre cette brutalité grunge (ils précisent acoustique, grunge oui, mais acoustique), cela donne ce travail fait maison, ces chansons tissées a la main dont la voix décrit des histoires pures, des petites anecdotes de vies, des éraflures. Bien sur il y a du Vedder, il y a du Fleet foxes, du Elbow, et des cendres de vieux gurus du crash américain, par là, dans les débuts de ce siècle, il y a du Daniel Lanois et du Lambshop, du « natif de là » et du « Celui qui a grandit ailleurs ». Ecouter « Safe » vous écorchera l’âme, vous tordra le passé et vous laissera moitié-mort mais si heureux de ce qu’il reste de vie, tant simplement comme avoir le plaisir d’un réveil calme. Il y a finalement, le doux plaisir d’écouter avec facilité ces petits déboires sonores, contés dans le garage trafiqué en studio, comme dans nos salons, aux porches de nos demeures, dans l’accalmie des soirs d’été (« Honey is à balm » est parfaite pour ces nuits à regarder le ciel étoilé). « On a fait avec nos moyens » et heureusement pour nos existences de superproductions de tout, d’effets spéciaux trop réels pour être réels, qu’il reste l’honnêteté de deux mains ouvrières, (quatre pour les duos), l’humble ouvrage des paumes et phalanges, le serein petit travail de l’âme sur les émotions et leurs explications, le travail journalier de compiler les battements de cœurs sur les cordes et peaux tendues, leur donner un sens, celui de la sensation d’humain, défauts et diamants.




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