> Critiques > Labellisés



Autant que je m’en souvienne, j’ai toujours aimé la musique, j’ai toujours vécu musique, vécu en musique.

Comme je vous l’ai déjà dit, je suis né dans les années 70 à Brest. Mes parents habitaient dans une grande tour de 13 étages dans le quartier mal nommé de Bellevue.

La musique m’a toujours accompagné... Du "Beau Danube bleu" au générique d’"Amicalement Votre", des hommes volants de Folon à l’inévitable chorégraphie de San Ku Kai.

Quand je me revois jouant, je me rappelle de mises en scène tonitruantes et de ces B.O imaginaires hautes en décibel pour le plus grand désarroi de mes voisins.

Quand je descendais jouer dans le parc en bas de chez moi, en général, tout le monde le savait et il n’était pas rare d’entendre certains soupirs de soulagement derrière les fenêtres ouvertes quand enfin je retrouvais le chemin de ma chambre.

Je vivais musique, j’étais musique...Je me demande souvent si je n’ai pas su fredonner avant de prononcer un mot.

Plus tard, ce sera ces concerts imaginaires avec cette guitare toute aussi imaginaire devant une foule en délires.

Pour moi, la musique, c’est avant tout le mouvement, une passerelle entre les âges.

La musique, ce n’est pas seulement combler le silence. Et puis, le silence n’est pas singulier, il est pluriel et multiple.

Ce silence de la crainte de briser la sérénité quand les corps se séparent. Ce silence mal aisé quand par maladresse, par timidité, on a dit le mot qu’il ne fallait pas.

Ce silence avant le rire, ce silence estompé après les pleurs. Ce silence comme un poids.

"Familiars" de The Antlers est de ces promesses d’accompagnement de cet ami solitaire.

Entre épure et grandiloquence, entre lyrisme et retenue, la musique de Peter Silberman dévoile enfin ses merveilles subtiles. Attachant jusqu’à présent, on attendait encore le grand album que l’on sentait venir des gars de Brooklyn. Non pas que leur musique n’était pas déjà attractive mais il manquait une petite touche d’empathie qui nous mène plus loin.... Derrière l’émotion semblait se cacher une froideur et une distanciation.

Du somptueux "Palace" en ouverture traversé par cette trompette spectrale à un "Doppelganger" enfin en empathie, The Antlers est enfin dans son sujet et nous subjugue bien souvent.

Cette phrase me rappelle une conversation avec un ami musicien sur des réseaux sociaux. Nous discutions de sa musique que je trouvais très belle mais presque trop propre et appliquée. je me rappelle cette expression que j’utilisais, Sors le chien, ose le primitif...

Quelque part, c’est un peu ce que The Antlers parviennent à faire dans cette implication plus maitrisée face à leur émotion.

La musique de Peter Silberman est comme nimbée d’un filtre brumeux, aquatique. Nous revenons à l’utérus, la matrice bienveillante. Nous la sentons cette lumière qui s’annonce, qui contribuera de notre évaporation ("Hotel")

Entrer dans "Familiars", c’est comme entrer dans une "Soul" sans joie, un peu comme celle des frêres aînés de Lambchop... Nous nous cognons aux murs dans l’obscurité avec ces mains qui nous agrippent comme dans ces trains fantômes ? ("Intruders")

Quand on ne croit plus en rien, peut-on réparer ce qui est cassé comme d’autres font des enfants pour en faire les coques accueillant tout leur chagrin ?

Existe t’il quelque part un jumeau en souffrance ? ("Director")

Peut-on revisiter des endroits de nos mémoires comme des amis perdus de vue ?

Peut-on se reconnaître dans ces deuils de nous mêmes ? ("Revisited")

Peut-on retrouver la beauté de ces corps jeunes ? Peut-on brûler les images des icônes ?

La musique de The Antlers gagne en humanité ce qu’elle perd en froideur. ("Parade")

Pourtant les propos restent les mêmes mais comme condensés, concis et ramassés comme une ouverture, comme vers moins de claustrophobie ("Surrender")

Jusqu’à présent, nous baignons dans la fange des souterrains.... Ici, le regard est porté vers les étoiles, étranges paradoxes de lumière et de mort...

The Antlers ne sont plus seulement ces gentils garçons attachants mais appliqués. Non, ils sont aussi ces compagnons d’errance, ces proches, ces familiers, ...

http://antlersmusic.com/




 autres albums


aucune chronique du même artiste.

 interviews


aucune interview pour cet artiste.

 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.