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Que dire d’un album qui nous a largement déçu alors que d’une manière générale on trouve le travail de l’artiste plutôt exceptionnel et on est même « fan » ? Eviter de passer son aigreur et son désarroi, et regarder les choses le plus objectivement possible, tout en conservant une relative indulgence car on a écouté en boucle les albums précédents et on a ressenti beaucoup d’émotions lors de ses concerts passés…

A la première écoute de Vengeance, mes tympans n’en croyaient pas une note et sur les sept premiers titres je me suis exclamée intérieurement : « Mais qu’est-ce que c’est que ça ? », comme une impression d’endormissement massif sur des lauriers post-Superbe…

« Aime mon amour », le morceau d’ouverture choisi comme premier single, ressemble à du Pascal Obispo, peut-être est-ce le résultat de la fréquentation récente de Pierre Jaconelli, l’homme au jeu de guitare efficace mais sans âme qui naguère arrangea et joua les guitares chez Zazie & Obispo et accompagne désormais BB sur scène depuis 2 tournées, toujours est-il que la sauce ne prend pas… Sur les morceaux suivants les arrangements trop foisonnants sonnent un peu fouillis, les paroles sont banales alors que je sais la finesse, le cynisme, le désarroi, la mélancolie et la poésie qui peuvent d’habitude se dégager de l’écriture de Benjamin Biolay. Les thématiques amoureuses déçues sont toujours les mêmes, mais moins bien décrites qu’avant, cf le très dispensable « Personne dans mon lit » versus le très réussi « La chambre d’amis » sur l’album « Trash Yéyé »…

On remarque aussi que le fait d’inviter des amis artistes plus ou moins prestigieux n’améliore pas forcément la donne (Vanessa Paradis, Orelsan, Sol Sanchez). Seuls la voix angélique de Julia Stone, le phrasé d’Oxmo Puccino et le vibrato de Carl Barât arrivent à se détacher du lot.

N’étant pas du genre à condamner un disque aussi facilement, je poursuis mon écoute et là, arrive le morceau n°8, la pièce montée... Chez BB, j’ai remarqué (après cela n’engage que moi) qu’il y a sur chacun de ses albums au moins un morceau nettement plus soigné et riche, et souvent très enthousiasmant, qui plane au-dessus des toits… Pour ceux qui ne connaîtraient pas le répertoire de l’homme en question, ils peuvent jeter une oreille chronologique aux titres « La dernière heure du dernier jour », « Négatif », « Glory Hole », « A l’Origine », « Laisse aboyer les chiens », « Padam », etc.

« Ne regrette rien » est ce morceau-là, on retrouve tout ce qui peut faire aimer Biolay, l’écriture qui touche en plein cœur, les arrangements classes, et ce petit truc en plus qui vous fait décoller. Ouf… (avec un léger bémol, lorsqu’Orelsan débarque avec son mauvais flow à 4:11, on a bien envie de le faire taire tellement il gâche tout…)

« Vengeance » en duo avec Carl Barât vous donne une petite claque au passage, histoire de vous rappeler qu’il ne faut pas croire, les morceaux de bravoure existent bel et bien sur un disque tiède…

Le très doux « Trésor Trésor », dont le titre n’est pas sans rappeler « Bijou Bijou » détend l’atmosphère et le disque termine tranquillement sa route sans trop de heurts, avec au passage le beau et nonchalant « La fin de la fin », qui vous donne envie de prendre un cocktail au soleil sur une chaise longue (pour une raison qui m’échappe, ce titre me fait penser aux chansons de Dionne Warwick), et une conclusion légère en duo avec Julia Stone sur « Confettis ».

En résumé, un Biolay pas vraiment grand cru, plaisant à écouter à partir de la piste 8, mais décevant au vu du parcours de l’artiste. Un point positif, son chant est plus aérien, comme libéré du syndrôme Gainsbourg (dernière période) ou Miossec, maintenant peut-être faudrait-il que le chanteur se libère également de certains codes d’auteur-compositeur qui le font tourner en rond sur ce disque ?

Réponse au prochain album… ou sur les précédents !