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Je découvre Lozninger avec ce disque, et je dois dire que la découverte est agréable. Je me suis vite laissé emporter par cette douce invitation et tous ses aspects qui en font sa richesse. "Nobody Knows" est un bon morceau d’entrée, mélodie simple et efficace, belle voix qui commence en douceur, au dessus du murmure. "Silver Jailhouse" nous en dit déjà plus sur la provenance de Benjamin Lozninger. Oui, il y a du Canada là-dedans, surtout dans ces arrangements (le banjo notamment) et sa mélodie folk immédiate. On ressent la bonne influence de Mark Linkous ! "Cold Fraction" quand à lui s’ouvre tout en beauté, harmonies vocales en forme de nappes mélodiques. Puis vers la seconde minute, ça décolle haut, dans une envolée furtive qui redonne encore plus de valeur au redémarrage en douceur. Le morceau suivant, "Junk slowdown" semble imbriqué avec le précédent. Encore une fois, Sparklehorse n’est pas loin, en cause ce goût doux-amer dans la mélodie, la largeur du champ sonore, le rythme d’un marcheur pensif...Il y a une saveur pop irrésistible, et une grande richesse des arrangements. Sans doute un côté un peu foutoir aussi, qui lui vaut le rapprochement avec certains as du bricolage sonore. "Like a snake" est plus brut, sauf pour les voix qui semblent écrasées par la force des guitares, donnant un effet excellent. "Moving targets" qui donne son nom au disque est un splendide morceau calme dont la fin est d’une douce mélancolie, avec une esthétique post-rock (Canada quand tu nous envoie dans tes constellations...) sans la longueur. Il faut aussi dire que Lozninger a un timbre de voix enivrant, qui nous ballade, nous fait voir des terres lointaines. Mon coup de cœur du disque va à "Two shorten the road" pour sa mélodie délicate, ses arrangements, ce son délicat et profond, avec une sorte de distance qui nous invite à l’évasion. "Stranger" me renvoie à certains des albums de Eels que je chérie, pour cette faculté à accoutumer l’évidence pop avec un côté noise et foutraque, tout en maintenant un rythme entêtant. "The wintersong" démontre une fois de plus qu’avant tout, Lozninger est un mélodiste. Mais aussi un fouilleur de sonorité plein d’imagination, dont les trouvailles pose un décor parfaitement adéquat à ses morceaux. "O’Bradley Joe" nous dit au revoir dans une montée vers un blizzard de bruit blanc, reliant toutes les facettes de Lozninger, voyageant entre folk, rock, folktronica, noise, expérimental, sans frontières musicales. Peut être parce qu’il a franchi la grande frontière de l’Atlantique pour venir en France. On aimerait plus souvent des transferts comme celui-là !!! Un disque ravissant qui réussit le pari de faire passer une grande richesse sous le masque de la simplicité, ce qui ravira beaucoup de monde, les amateurs de belles mélodies, ceux du bidouillage aussi, les auditeurs attentifs qui savourent au casque, mais aussi ceux qui sont plus distraits. Bravo et rendez-vous dans peu de temps, car le second disque ne va pas tarder à nous arriver !

Barclau

PS : sur bandcamp il y a une reprise de "Toxic"qui vaut le détour. Un vrai détournement.