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Les frères Nubuck sont de retour, après l’indispensable chez les nudistes, convoquent chez nous les souvenirs de nos lectures affolées et poignantes de Cioran. Il est beaucoup question de la mort dans ce nouvel album, même celle de Drucker, sans jamais pour autant la souhaiter. Il est surtout question de ce qui a fait sortir Delerm (le géniteur) de l’anonymat, avec un talent bien supérieur que les tartines du barbu peine à jouir. Le sujet de prédilection reste les petites joies ou tristesses de la vie, sans jamais faire appel au pathos. Aimant autant le folk mélodique, que la sucrerie pop qui peut aussi coller aux oreilles, le duo fait preuve d’un dilettantisme appliqué, d’une dérision sérieuse, choyant l’ambiguïté l’antagonisme lexical. On pense pas mal à Chabrol à l’écoute des frangins (chaque vivant est un mort en puissance) on repense aussi à ce que nous disions à l’époque des nudistes. Cioran, Chabrol, Will Oldham, Kad et Olivier, la carte d’identité des deux commence à donner des signes de rapprochement pouvant définir un personnage complexe, mais pas complètement difficile à cerner. Invités fictivement (heureusement pour eux) sur le plateau du pétomane télévisuel (monsieur Ruquier je rigole seul de mes blagues) les frangins se mettent dans une situation inverse de leur proposition de toujours. Car si le rire est un postulat de départ pour beaucoup, quand on demande de définir les Nubucks celui-ci n’est en aucun cas le moteur d’une musique pouvant nous emmener là ou peut peuvent aller, au paradis (le miraculeux leader d’opinion). Loin du rire (même Ronald nous ferait pleurer), loin de la condescendance ou de la tristesse à tout va, les frères savent qu’ils vont mourir et nous demandent peut-être amicalement de ne pas oublier que nous aussi ferons parti de cette phase de destruction, histoire de ne pas gâcher le temps qui file. On ne les remerciera jamais assez de prendre autant soins de nous. Ne cherchez plus le meilleur groupe français, c’est celui qui vous veut du bien en parlant surtout du mal.