> Critiques > Labellisés



Il n’est jamais trop tard pour parler d’un bon disque, dira sans vergogne le chroniqueur dépassé par l’horloge, haletant, à bout de souffle. Qu’est-ce que quelques mois à l’échelle d’un disque ? Une broutille, si ce disque possède intrinsèquement la force de résister au temps. Celui de L’envoûtante est sans conteste de cette trempe.

D’abord ce nom qui trompe son monde. Point de muse ou de créature qui rendrait des êtres influençables accrocs. En tout cas pas dans le sens où on l’entend habituellement. Vient ensuite la surprise de la voix, haut perchée sur le premier morceau, et qui interpelle à plus d’un titre, posant un hip-hop / spoken word départi de toute sorte d’artifice.

Tout part de rythmiques, organiques, humaines, incarnées et au son brut de décoffrage. Pas étonnant qu’on retrouve aux manettes l’artisan de l’album culte #3 de Diabologum, Stéphane Teynié. Ici on ne se cache pas derrière des effets à la mode, ici on est loin, très loin de la scène hip-hop actuelle qui cartonne à grand coup de trap et d’autotune, ici la rythmique en point central apporte une énergie (rock) et des nuances. Et, avec l’aide de quelques sons analogiques affirmant l’artisanat de l’ensemble, le flow se pose, et les mots percutent.

Du duo batterie-synthé / voix, on ne sait pas grand chose, à part qu’il n’a rien d’urbain, comme l’étiquette qu’on tente vainement de coller sur un style de musique finalement impossible à situer. Il est en revanche clairement en périphérie, en marge, à préférer les sentiers non balisés aux autoroutes de la pensée pré-mâchée. Cet album en est le manifeste. Un manifeste pour ne pas penser en rond, pour une simplicité volontaire et assumée, pour ne pas perdre le contact avec la terre, pour remettre l’humain au cœur de la société, pour ne pas rester passif face à son évolution délétère mais prendre part, s’impliquer, contrecarrer, s’évader, autant que possible, avec des actes, et des mots, des images, des émotions.

De sa position décalée, dans le maquis, L’envoûtante prend le recul nécessaire pour nous remuer, pour se questionner aussi.

C’est un album qui ouvre la fenêtre
Dégage les bronches
Qui fout des coups de latte
Dans la tronche.

Et on en redemande.




 autres albums


aucune chronique du même artiste.

 interviews


aucune interview pour cet artiste.

 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.