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"Now let’s the race that won’t let’s get on history", cette phrase de looser, tiré de "Hail hail Rock’n’roll" (1991), est le visage même de son créateur, l’immense Garland Jeffreys, le malchanceux Garland Jeffreys. Voici la biographie de cet homme qui a côtoyé les dieux sans arriver a l’olympe, d’un compositeur, chanteur, artiste, qui connait les limbes comme la paume de sa main, mais ne sait où sont les rives. Ni black, ni blanc, lui qui a toujours désiré une teinte Motown o Kingstown sur sa peau, où un pigment blanc nocturne comme son ami Lou Reed ou de Jerry Lee Lewis (ce nom là est dans toutes les bios de chanteurs, semble-t-il), c’est retrouvé dans la peau café d’un portoricain, sans se rendre compte que ce métissage allait lui donner l’intelligence des sons. Petit homme sympathique, malgré les mauvaises chances, chanteur original, latin jamaïcain new yorkais (est-il vraiment né a Brooklyn ou est-il une compil géographique ?), quelque part européen, mélancolique et peintre a ses heures, il se berce des crooners et rockers des années 60, des fils d’Elvis, il se fait pourtant remarquer plus dans le blues et le folk que dans l’aire rock (on le trouve même dans certains documentaires de Blues. Garland est un compositeur plus sensitif que technique, riche en idées, il tournera petit à petit vers un son presque plus exotique, avant de fusionner tout son savoir d’une manière personnelle et intense. Quand a moi, je l’ai vraiment connu en revenant sur ce magnifique "Ghost writer", véritable panoramique des locataires de New York. Les mies semées (ce souvenir d’une douce cover du "No woman no cry"en 1978) me firent retrouver son chemin alors que la radio passait un jour ce "Matador" et puis m’accrochèrent a lui définitivement sur ce "Hail Hail Rock’n’Roll". Sa mélancolie et facilité d’écoute, ce truc magique qui rassasie qu’ont Chris Rea ou Kurt Vile, sans effort, sans révolutions, m’attire, me plait, simplement, le plaisir. Il est sur que mes gouts musicaux sont assez différents en général, quoiqu’ouvert a toute sensations, ont acquis une base dans notre jeunesse difficile d’outrepasser. Il faut donc une certaine magie, ou un art, un talent spécial pour nous faire dériver vers autre chose. Garland l’a, sans avoir l’air de rien, il a l’air de tous. Alors voila, quand on m’offrit de cadeau, car ceci est toujours un cadeau, et bien que ce seigneur ne soit d’aucune mode ni d’un temps précis, j’ai couru vers lui, la dernière information que j’avais de lui étant un concert avec Elliot Murphy, des participations dispersées dans le temps et l’espace, son propre label Luna Park, sa présence sur "The blues", le documentaire de Scorcèse, des maladies ci-et-là, un speech dans le documentaire "The soul of man", dirigée par Wim Wenders et une myriade de prix sur tous les continents, qui avertissent du talent, mais n’ont eu aucun effet sur la faible renommée économique et personnelle du bonhomme. Il enchaine des disques avec tout l’amour de la critique et toute la méconnaissance des masses. Il revient en cette année a ce New york qui l’habite même au lointain, et lui offre une ode de plus, a sa manière, sans frontière spirituelle, en volant au skyline chaque visage, du plus noir au plus roux. Porté par sa voix naturelle et sans prétention, sinon celle du conteur, charmeur de serpent a ses heures, il passe du boss au blues, du Bob au gospel. Il est de loin, le seul chanteur à avoir parcouru le son de chaque rue de la grande pomme, et à graver spirituellement chaque ombre et lumière des lieux de naissance de la musique américaine. Il le fait entre la légèreté des chanteurs playboy des 70’s et la rage des concertistes rock de stadium, voyage facilement entre un jeu et une lamentation, du quartier latin au Broadway néon, de l’église du dimanche au parc déchaussé. Comme d’habitude, il offre un disque sans style fixe, cent styles illuminés, où chacun s’y retrouve, des disques aux milles rues, issues de secours toujours nostalgiques, mais où le ciel s’entraperçoit toujours, malgré les hauteurs, malgré les bassesses. Il a ces coutumes de vieux baroudeurs de la folk rock d’en dedans des terres, ces Dylan, Cohen, Neil Young, et ces habitudes de jeunes rêveurs noirs des Motown, Marvin, Al Green, Otis. Mais il a de manière innée la saveur des gens du Mississipi qui n’ont pour couleur que la sueur de leurs peaux et d’une manière conquise la fièvre religieuse et libre des trouvères jamaïquains. Garland est histoire du rock et de la soul en même temps, il en est la biographie, et sa musique en est la géographie, osant une cover des Beatles (Help) et en une seconde il frappe, activiste comme ce War d’Edwin Star, puissant comme un jeune loup rappeur. Et tout lui réussi, car il semble avoir inventé toutes ces sonorités depuis le début des temps. Ce 14 steps to Harlem est la ballade historique des monuments musicaux de la ville, un tour des roots jusqu’aux roofs, avec un talent qui se nourrit de naturel, de simplicité scandée, de colères susurrées, de la toute banale beauté du coin a côté. Une fois de plus, un disque merveilleux à écouter, les yeux rivés au monde, qui n’aura pas d’autre gain que le bonheur, mais ce doux amer café au lait, ne cherche autre chose que cela, le bonheur.




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