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Après la tonalité verte du Monde Réel, Dominique A revient déjà avec cette fois-ci une tonalité bleue. Suite à un disque qui méritera que l’on s’y attarde, le temps donnant toujours raison à l’excellence, Dominique A revient avec un album reflet, nous faisant perdre dès la pochette notre équilibre (Le Retournement), se jouant de notre perception même du monde en faisant passer le ciel pour une étendue d’eau miroir d’une forêt aux cimes hautes et altières, comme pour mieux nous faire perdre un sens à retrouver. Le ciel vert est ici bleu, le monde de Dominique est toujours aussi réel, même s’il est ici empreint d’une nostalgie terrible, enfonçant le clou d’une responsabilité partagé et accablante (La Plaine). Ces huit titres (six chansons et deux instrumentaux) ne sont pas des chutes de studios fruits des sessions de l’album « Le Monde Réel », mais un travail annexe à l’album en construction d’alors.

Ce EP a sa constitution propre (il n’est pas le fruit d’un moment suspendu, comme le splendide Le silence ou Tout Comme sorti en 2020 suite au confinement.), son cheminement, reprenant certes les aspirations musicales de l’album, mais avec une voilure peut être moins ample, que ce soit musicalement que dans les textes. Les morceaux semblent avoir été enregistrés dans la cuisine de La Musique, sauf que Dominique a dû pousser les meubles pour faire rentrer tout le monde, les musiciens jouant en adagio pour éviter les remous du voisinage, mais en gardant une amplitude rare. Les textes prennent leur source dans les aspirations plus poétiques de Dominique Ané (Le Présent Impossible), se recentrant sur l’épiderme (cette fameuse peau) plus que l’horizon (même si « La Fadeur et l’intensité » ouvre un panorama écrasant de beauté).

Avec ce nouvel EP, Dominique semble prendre une bonne fois pour toutes la tangente, se jouant des couleurs et des couleurs du ciel, faisant plus qu’irruption dans une chanson française littéraire, nous éclairant par son désenchantement solaire (le sublime Les Yeux Dans le Soleil). Tout a été dit depuis le début de sa carrière, sauf la rencontre d’un écueil. Ce n’est toujours pas le cas ici, et si l’embarcation s’est étoffée avec le temps, elle reste aussi fragile et chahutée, mais continue son chemin avec densité et pertinence. Dominique A, plus que la question, le chant des toujours possibles.