> Critiques > Labellisés



Heureusement la musique, contrairement à un certain mode de pensée, n’a jamais été unique. La preuve une nouvelle fois avec ce premier LP polysémique du trio Imbert/Zarn/Pépin aka Boucan, qui au gré de leurs spectacles, rencontres et voyages respectifs ont fini par croiser ensemble le fer et les cordes de leurs instruments, le feu et la rage de leur verbe.

Tous trois issus d’univers bien mouvants, ils auront chacun à leur manière développé des projets perso et collaborer avec d’éminents jazzmen comme avec des musiciens traditionnels ou des performers artistiques atypiques. La liste est longue, on vous laissera la surprise de découvrir la beauté de leurs parcours ô combien picaresque. (Quelques pistes tout de même, en vrac : Imbert Imbert, Kestekop, Le Tigre des Platanes...)

Un parcours donc, qui les mène aux onze titres de ce Déborder, un titre en forme d’injonction qui colle parfaitement à l’esprit du disque. Un parcours, aussi et surtout, qui les pousse dans les bras experts du légendaire John Parish qui les aidera à mettre en lumière le foisonnement de leurs idées. Parce que s’il y a bien une chose qui est certaine en ce bas monde, c’est bien que les Boucan ont des idées à revendre. Si on osait, on dirait même que ça déborde !

Si on sent la patte "Parish", c’est essentiellement dans ce geste, qui reste certainement son credo ultime : laisser la musique prendre l’espace qui lui est dû, sans en rajouter, sans l’influencer outre mesure. En somme, canaliser plus qu’organiser. Et être capable de sonner parfois la fin de la récréation sans jamais rien recréer.

Aurait-il pu en être autrement, quand dans un même studio - et pas des moindres, The Rockfield Studios ! - vous vous calez avec trois olibrius qui n’ont pour seule envie que celle de déborder - encore ?? - des frontières de leurs mondes, qu’ils soient jazz, blues, hillbilly, polyrythmique, éthiopique, punk. Pour partir à l’assaut d’un folklore imaginaire et tellement singulier : leur boucan !

Leurs préoccupations esthétiques allant ainsi dans cette même direction, impossible de ne pas sentir la fraternité qui les lie. Entre eux , bien sûr. Avec nous aussi. La Fraternité de celles et ceux qui voit dans l’acte musical l’avènement de la Grande Improvisation. Le Consortium du Bordel Organisé comme art du vagabondage sonore. Celui qui fait sonner chaque note, chaque mot comme un acte subversif, beau et unique à la fois. Celui, primordial, de ne jamais, au grand jamais, laisser la vie nous rattraper.

Alors, au travers de ces onze morceaux de bravoure, on bascule inlassablement des bastringues d’Addis Abeba aux distilleries clandos des bas-fonds de Treme en passant sur les tréteaux flingués d’un cabaret punk où ne résonne que cuivres et cordes pas que vocales. A l’instar du syncrétisme sauvage des mythiques The Ex, ou plus proche de nous, des non moins furieux Electric Bazar Cie.

Au fil des plages, c’est de plus en plus de force qui nous emporte, au-dessus de nos a-prioris, nous pénètrant jusqu’au plus profond de nos acquis, de nos cas de conscience.

Un rare plaisir que celui de se laisser ainsi aller, de se sentir à ce point partir en se contentant simplement de... Déborder. Encore ? Toujours, s’il vous plait !!




 autres albums


aucune chronique du même artiste.

 interviews


aucune interview pour cet artiste.

 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.