Je vous le conjure, quittez de ce pas ce que vous êtes en train de faire. Abandonnez vos effets personnels, donnez à vos souvenirs matériels une nouvelle liberté, et venez me rejoindre sur la colline, celle qui fait face au spectacle tout vous mettant à l’abri de ce phénomène, ici pas totalement naturel, celle de l’explosion d’un volcan à la lave extraordinaire, un sang de la terre pas tout à faire comme les autres.

Saint Sadrill n’est pas un lieu dit, une ile qui serait sortie des entrailles de la mer pour héberger une race d’oiseaux pécheurs de grande envergure, même si de l’envergure, la musique du créateur de ce nom (Antoine Mermet) il en a. Elle est pétrifiante, déconcertante de beauté et d’audace, tant les chemins empruntés dénotent d’un sens quasi mystique du rejet de la facilité, de l’ennui, de l’évidence.

Pourtant celle-ci, l’évidence, elle va s’imposer à nous, et le spectacle proposé tout au long de « Pierrefilant » est à ranger quasiment dans la section chef d’œuvre, seule section pouvant accueillir des chansons toutes aussi déconcertantes par la beauté mélodique, que par la manière dont à Antoine Mermet et ses comparses ont de catapulter ses lignes qui pouvaient se suffire à elles même vers un ailleurs que seuls des groupes comme les Flaming Lips ou Mercury Rev purent ses dernières années nous emmener.

Ce n’est pas un magma qui sort de ce volcan, c’est un breuvage auditif digne des orgies du royaume des dieux. Il ne se passe pas une seconde, sans que nous soyons éberlués par l’audace, et par la beauté de celle-ci. Ce n’est pas une éruption destructive, c’est la construction d’une architecture poétique, portée par une musique sans limite et par un chant qui ne semble vouloir qu’une chose, nous libérer.

« Pierrefilant » est une rencontre rare, la photographie d’une musique en mouvement qui nous impose une seule, celle de tout quitter pour elle, dans une forme de soumission libératrice. Vous avez dit Chef d’œuvre ?