Onze années d’existence, neuvième album, Misophone est presque une anomalie dans la musique dite souterraine. Un groupe qui dure et qui enchaine les enregistrements avec une précision d’horloger suisse. Mais c’est bien dans ce domaine que Misophone fait preuve d’un pragmatisme si précieux des scientifiques, car dans la musique Misophone font plus dans la rêverie, dans les histoires loufoques, dans les expériences revenants de notre enfance.
Qui peut à ce point se targuer d’avoir trouvé un son, comme un grand photographe peut faire sa carrière sur un grain. Misophone en a un de son. Il sait à la fois séduire des oreilles enfantines, celles plus rigides des amoureux d’une musique folk matinée psychédélisme, le tout avec un rien de friture sur la ligne pour donner au document un aspect presque ancien, comme si les bandes avaient été repêchées au fin fond d’un océan, retrouvées dans une mâle recouverte par la poussière que le temps aura déposé pour garder ce secret à lui, le plus longtemps possible.
Mais le temps n’a pas d’emprise sur Misophone. Il y a chez Misophone un côté Yo La Tengo, non pas dans la musique, mais dans la capacité de durer, d’être reconnaissable entre tous, tout en se réinventant sans jamais se renier. Ce neuvième album est une suite de douze chansons oscillant entre navigations dans une mer d’huile mais recouverte de brouillard, et une plus déchainée mais inoffensive, par d’attraction naturel donnant des sensations aussi fortes que inoffensives.
Tel un phare planté là pour nous montrer un chemin tortueux, Misophone n’omet pas d’offrir aux navigateurs, aux pirates des hautes latitudes, l’occasion de pouvoir se rendre dans une taverne dont on aimera chuchoter le nom de peur de réveiller les morts (Dead Man). Pas besoin d’une carte pour trouver le trésor moussaillons, il est là en format cd.