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« Poésie électrique à coups de marteau ». La biographie de Bruit Fureur est courte mais précise et pourrait se suffire à elle-même. A l’aune du blase choisi par le duo toulousain, évoquant le fameux roman de William Faulkner tout autant que la rage ressentie face à un réel qui nous écharde, échappe et nous déplaît, l’on se doute que l’on va prendre cher : Christel Rodriguez et Marie Olaya ont la colère chevillée au corps, un corps incandescent, assumé, bicéphale, érigeant en neuf titres abrasifs, sur fond de noise, un idiome à la flagrante contemporanéité. Si Matriochkas, de par sa scansion martiale, d’emblée nous prend à la gorge, c’est pour mieux desserrer son emprise, une crépusculaire guitare solitaire gorgée de réverbération distordue prenant le relais à partir de la seconde moitié du morceau : du bruit, de la fureur, mais aussi de la nuance et des accalmies, à l’instar du court Interlude qui suit, rappelant les ondées sonores de Neil Young sur Dead Man. La formule est minimaliste, Bruit Fureur fait beaucoup avec peu, ça fait mouche : sur Trois Combats, les mots claquent, féroces et affirmés, les riffs s’enchaînent et s’empilent mais rien ne dépasse, la concision est de mise, on a froid dans le dos - « Une épouse manque de mourir / Lui appuie sa main puissante sur sa tête à elle comme d’une tête d’ail ». Motif de six-cordes désarticulé cher à la jeune Cat Power sur Argelès Mon Amour, clin d’œil à PJ Harvey (l’intense Polly Jean !), Lydia Lunch jamais très loin, nous voilà en excellente compagnie, et les textes - taillés au cordeau dans une langue clinique - ne sont pas avares en auto-dérision, même si Respire à Fond, sur sa fin à la lisière du black métal, prend carrément aux tripes. « La terre noire colle à mes basques, la terre rouge colle à mes rides », l’orageux Vox en devient translucide, tandis que le conclusif Fiat Lux se fait apocalypse au ralenti, en sept minutes zébrées de constats émouvants écrits dans une langue particulièrement vivace : « L’aube ! L’aurore ! Le mauve de l’aurore se mue en un orange cuisant !! ». Exigeant, abruptement original, unique, un pied dans l’avant-garde, l’autre dans la terre boueuse de nos non-dits, le premier album de Bruit Fureur claque au vent comme un pavillon pirate et ne fera pas de prisonniers, vous voilà prévenus.




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