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J’ai longtemps bloqué sur l’album de Camille Benâtre, non pas parce que la voix me faisait penser à celle de Nicolas Paugam qui a la particularité de me crisper. J’avais la sensation de connaître la pochette, de l’avoir déjà vue quelque part. Me plongeant alors dans ma (trop) grande discothèque, je tombais enfin sur « Sing Favorites », un album de Mark Kozelek leader de Sun Kil Moon et de Red House Painters. Dans ce disque en compagnie de Mike Patton, Rachel Goswell, Mimi Parker ou encore Will Oldham, Mark reprenait des morceaux de Bowie, du couple Sinatra et d’autres. La photo qui orne la pochette semble être la banlieue proche de la ville que Camille Bénâtre nous montre des toits de celle-ci. Les mêmes couleurs, le même grain.

Hasard certainement, mais les écoutes répétées des dix morceaux de cet album d’à peine 30 minutes de Camille à un lien évident avec l’indie folk américaine, notamment si on pense au regretté Elliott Smith. S’il n’y a pas une forme de désespoir poli comme chez l’Américain, c’est une mélancolie joyeuse qui nous berce, nous donnant dés le premier morceau (Laisse Filer) les clés pour aborder au mieux ce qui va suivre. L’amour est comme dans toutes bonnes chansons qui se respectent le sujet principal, tout est dans l’angle avec lequel il sera abordé, et celui choisi par Camille a la particularité d’être parfait, donnant au rapporteur calculateur le droit d’entamer un pas de danse sous les ampoules colorées d’une guirlande au dessus de la piste de danse d’un bal de fin d’été (À L’Heure du Soir). L’amour toujours, mais pas pour toujours encore que (À Zéro), quitte à faire sa révolution en commençant comme dans un conte par "il était une fois" en utilisant les pinceaux d’un Ennio nouvel ange dans notre ciel imaginaire (Trop près du Soleil). Sachant manier l’ensemble des degrés et pas seulement ceux des angles, Camille sait faire de l’ironie une facette nouvelle, non pas pour sortir grandi d’une histoire, mais au moins d’en être le perdant charmant.

Le disque bascule alors avec « Ticket pour Téhéran » un instrumental internationaliste, un duel de tchatch sans un mot d’un troubador fabuleux. Adepte de la métaphore filée sur « Vieux Loup », cinématographique quand il se balade dans la trame d’un possible Téchiné (Juste avant (que je tombe amoureux)) ou thuriféraire d’une sorte d’excellence française, avec « Les Miroirs dans la Boue » , ou quand la chanson française populaire dans ce qu’elle a de plus beau surgit et que nous frappons également des deux mains en cadence, saluant le génie trop souvent oublié de William Sheller, Camille montre une palette diverse. « Le Message » qui clos l’album est une démonstration de plus que Camille en s’étant nourri d’une folk d’outre Atlantique n’a jamais fait de celle-ci la substance principale de ses compositions, mais est parvenu sans la décharner à l’accommoder à une langue qui avait souvent signé un divorce consommé. Comme sur un toit.




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