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L’étrange, l’inconnu, est une sensation qui inspire curiosité comme timidité, entre frayeur et obsession, c’est un effet qui ne sait laisser indifférent, je me souviens de ma réaction à voir au début des années 80 les premiers punks écraser les asphaltes, mes yeux exorbités, je me souviens de l’écoute du premier Dead Can Dance parvenu a mes ouïes (Spleen and ideal), les oreilles débarbouillées, et que dire du premier baiser... L’étrange, cette part ésotérique qui nous chatouille, ce truc ignoré et inexpliqué qui nous gifle quand il s’utilise sournoisement, comme ici, dans le cas sonore, comme Laurie Anderson et Peter Gabriel "This is the picture" pour un môme de 16 ans, ne me dites pas que vous n’avez jamais cherché a découvrir ce qui se cache sous l’émotion, sous le frisson, peur ou extase, le pourquoi de l’infinité de possibilité que la vue, l’ouïe, l’odorat et le tact nous offre, ce petit détour dans une composition qui décompose tout, ce sacrilège enfouis dans une pièce jazz, de la poésie dans le rap, et le soudain impact d’une voix anormale, entre belle et cruelle, l’anomalie, la jolie anomalie. L’impact, la surprise d’un nouveau son, c’est ce qui vient de m’arriver, comme un accident merveilleux (ma prof d’art, Mademoiselle Bergès, m’a dit un jour que l’art est un accident, un bout de verre caché dans le sable d’une plage comme dirait Bono). Au premier son, j’ai contacté rapidement (il faut tout faire rapidement quand il y a accident, comme pour ne pas perdre l’effet produit sur l’esprit) la section management de cette artiste, "Donnez m’en plus, que j’ouvre une recherche scientifique, quelque chose à creuser, a percer, a mettre a jour, l’anxiété me corrompt !!!" Penelope Antena a trouvé des milliers de petits accidents, et tous, ont donné naissance a de l’art, 10 pièces d’art, dix pas, dix aveux de l’âme. Ces accidents sont racines, ces accidents sont héritages Penelope retrouve de sa voix joueuse et protagoniste l’essence primitive d’où naquirent les impressions de Nina Simone ou Billie Holiday, ce gospel rituel répétitif et simple, sensible, quasi shamanique (son enfermement de cloitre d’un an dans un bois pour enregistrer ce disque a surement eu son effet sur la teinte ésotérique d’Antelope). On déniche dans cet organe omniprésent un retour aux sources des chants a travers l’avenir d’un son, et cette émotion que distillaient les voix blessées des esclaves, le jazz brut, le blues, le rythm’and blues, cette tonalité chaude qui donne un cœur a l’homme de métal d’un magicien d’Oz de nos jours actuels et fades ou bien plus qu’un cœur dans ce cas, une sève. Mais l’expérience de Penelope ne s’arrête pas dans les méandres de la voix, on y retrouve les accents d’un folk americana libre de frontières, sans épaisseurs ni lourdeurs et des à-côtés totalement électroniques, Lo-Fi, d’un songe électrique qui feraient rêver Thom Yorke et donnerait raison et logique a Philip K.Dick. Bien sur on fera un rapport avec la famille de Penelope, belle héritière de la chanteuse et musicienne Isabelle Antena (jazz précieux) et digne petite fille de Marc Moulin, compositeur dans l’ample spectre qui va du jazz a la musique électronique, mais le rapport n’est pas que spirituel il devient matériel dans l’usage des sons enregistrés par ses parents et le fait symbolique de jouer sur les mêmes instruments qu’eux, un hommage, ou bien plus, un lignage qui se propulse vers l’éternité. Le disque, bâti comme une ligne de vie, se déshabille au fur et a mesure, habillé de laine sur "June 87", a l’apogée sur "the cedars" où la production est magique, riche, impressionnant et seulement couvert par la répétition infinie de la voix sur "So it ends", une introspection calme, sensible, qui marque, sans coupure, le trajet de cette année encloisonnée dans les écorces et la solitude, véritable exercice de méditation sonore et intime, retrouvaille avec elle même et les fantômes qui la supportent. Il est aussi important d’avoir un contact avec le visuel de Penelope, les vidéos, teasers et documentaires qui accompagnent la sortie du disque et délivrent une image juste de l’onirisme de cet univers particulier. Si Antelope est en effet, comme je le suppose sans en être sur, cette contrée perdue d’Oregon, où se perdre est art, je n’hésiterais pas à y faire une promenade, même en rêve, même en sons




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