Depuis que je suis petit, je m’interroge sur l’univers. Savoir s’il y a une fin, et après cette possible fin il y a quoi, et si c’est le vide de quoi est-il entouré (ma question plus grand c’est de quoi est entouré Vianney). Petite crapule égocentrique que nous sommes, nous nous résumons à l’univers, comme ci celui-ci, le notre, était unique. Que nous étions en plus les possibles uniques êtres à façonner une poussière avec du talent et pas mal de conneries il faut bien le dire.
Réducteur, car unique, celui-ci est dans le fond aussi castrateur que pourrait l’être l’écoute sans discontinuer d’un monologue du vagin récité par Arlette Chabot un soir de contre programmation d’une soirée électorale.
L’univers….mais La Terre Tremble !!!! Elle change progressivement de son axe de rotation comme un Cosmos 2017 sans le lycra.
Avec ce nouvel album (d’ailleurs ne dépassons-nous pas ici le concept même de l’album pour celui au souffle plus grand qu’une épopée) lee trio nous fait entrer dans une dimension inconnue, celle où l’univers est au pluriel, ou la petite vision nombriliste fait place à une lecture panoramique et grandiose. Entre ces univers le trio semble étudier les parcelles y posant un son avec la précision d’un joueur d’échecs. Pas question préalable consistant à éviter le silence, mais avant toute chose utiliser les sons comme des acteurs des ambiances, mais aussi de la narration, chaque univers semblant avoir son histoire.
Dés "Henry & I" l’espace s’ouvre en grand. Le terrain de jeu semble sans limites, le trio monte dans un morceau d’ouverture dans lequel Jim O’Rourke s’amuse dans une capsule intersidérale appuyant sur des boutons qui proposent la vitesse de la lumière comme routine à tuer. Arrivé sur une planète inconnue nous y croisons des monstres (The Life Within).
Le pas lourd des harmonies vocales enfermées dans un tableau de jeu d’enfant que l’on accroche au lit. Sauf qu’ici l’enfant n’a pas peur et tire sur le nez d’un James Murphy revenu d’un club écrasé par la chaleur. C’est alors le moment d’un moment fort, très très fort (That Old Moonlight Through The Trash). La Terre Tremble !!!! dissèque un morceau de Depeche Mode, le décompose à l’extrême pour nous le resservir dans un état tout aussi végétatif qu’émouvant, tout aussi puissant que doux. Cette découverte des univers, si elle ne se fait pas dans la facilité, elle peut se faire plus simple, plus abordable, car chez La Terre Tremble !!! la pop n’est pas un vilain mot (Festina Lente). Par contre ses habits sont souvent à revoir. C’est de la haute couture en l’occurrence ci l’aiguille est remplacée par un pieu et le fil s’effilochant pour prendre de l’énergie de partout tel un vampire se nourrissant via les noeuds d’une toile d’araignée désordonnée.
Toujours dans un souci d’éclater la pop dans des univers parallèles "Melancholy Of a Beautiful Day" ridiculise les derniers efforts des animaux de feux via un morceau en apesanteur et en perpétuelle reconstruction, mais qui ne perd jamais de vue le plaisir de l’auditeur, c’est la différence entre se regarder le nombril (saloperie de petits terriens) et vouloir toucher les gens.
En parlant de toucher les gens, c’est ma fille qui me fera remarquer à l’écoute de « Ringroard Continuum » « papa c’est comme La Terre Tremble !!! » et au final ne serait-ce pas elle qui a raison. Ce titre n’est-il pas un des enfants cachés de l’extraordinaire ciné-concert « Tom & Jerry » ?
Ma fille qui adorerait cette pause musicale (Catch 2022) qui en dit long sur le talent et l’esprit ouvert de trois musiciens espiègles aux idées fortes et à la vision ouverte. Par contre à l’écoute de l’inquiétant « Svalbard » elle risque de devoir se cacher sous son lit. Le trio y semble aux commandes d’un golgoth qui avancerait à pas lourd et qui s’excuserait presque des dégâts qu’il provoquerait, essayant de se rappeler avec un pas de danse que ne renierait pas un Tony Curtis sortant du studio d’enregistrement d’un épisode d’Amicalement Votre.
Après l’étrange et exotique "Sannaires Novels", le voyage se termine sur « Petend I’m There ». Comme dieu après avoir fait le monde il décida se se reposer dans un hamac prés d’une oasis en écoutant des oiseaux colorés lui chanter des chansons belles comme des feux d’artifice. Le trio fait de même, après avoir construit ou décrit de multiples univers. Ils se reposent avec une chanson ronde, une ballade à siroter au soleil avec comme rondelle accrochée sur le verre les superbes harmonies vocales d’un groupe qui vient de signer l’acte de naissance des univers.
Si nous ajoutons à ce tableau le splendide artwork de Samplerman, il ne sera probablement pas nécessaire de vous soudoyer pour rapidement considérer ce disque comme une porte de sortie évidente et inévitable vers un ailleurs musical qui respire tout autant le raffinement, que la joie et la culture, le tout sans une once de pédantisme, avec plutôt l’impression de faire dans un sens de partage. La Terre Tremble !!! nous ouvre des mondes, casse les frontières et propose des univers, sur un « FauxBourdon » qui dynamite les postures retranchées actuelles, le tout avec un sens mélodique presque extra-terrestre. Maintenant que je suis grand je pense avoir trouvé des univers, et rien que pour cela merci La Terre Tremble !!!.