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Longtemps j’ai voulu aimer The Coral, comme longtemps j’ai attendu de trouver un album des Fiery Furnaces complètement bien. Il y a plusieurs critères liés aux deux groupes qui me faisaient miser sur une future claque, une fois leur esprit de discernement parfaitement mis en place : un dispositif, des influences irréprochables, de la désinvolture et un certain humour. Pour Fiery Furnaces, il aura fallu attendre que la sœur de la fratrie, Eleanor Friedberger réalise un album toute seule (ou dans une moindre mesure que Jason Loewenstein décide de les produire sur I’m Going Away). Concernant The Coral, c’est un autre groupe qui s’est chargé de faire le boulot à leur place : le premier album de Malachaï, The Ugly Side of Love, ressemble étrangement au fantasme que je m’étais construit autour d’eux, probablement trop éloigné de la réalité pour être un jour récompensé.

Mais je reste constamment aux aguets. Je sais par exemple que Matthew Friedberger, le frère de la fratrie, vient de sortir un disque hommage aux matricides en quatre actes, majoritairement instrumental. Ça c’est bon, je le sais bien.

Je suis même jusqu’à aller écouter l’album solo du batteur de The Coral, Ian Skelly. Il s’avère donc que c’est ce genre de batteur là : ceux qui « font office de ». Parce qu’ils sont parfaitement à l’aise à tous les postes et qu’ils finissent par prendre celui en souffrance pour soulager la communauté.

Sur Cut From A Star, Ian Skelly écrit, produit, joue et arrange la très grande majorité des chansons. Avec un dispositif d’esthète qui rend hommage au goût de la difficulté (c’est à dire ce qu’on appelait la normalité dans les années 70) : l’album a été entièrement enregistré dans le local de répétition de The Coral sur un magnétophone Tascam 4 pistes à cassette. Présenté de cette manière, le résultat est à double tranchant. Il s’agira soit du même type de gageure qui aura réussi à pourrir par le passé les albums de genre pensés par The Coral, soit la révélation d’un compositeur talentueux qui transcende la mythologie du son crado. Et le fait est que cette histoire de cassette, on finit par s’en moquer un peu. Je ne serais même pas étonné si elle relevait un peu de la mythomanie ou de la manifestation héroïque d’un sens de l’humour autour de l’esthétisme mal placé.

Ian Skelly présente son disque comme un hommage aux musiques et aux techniques d’enregistrement des années 60 et 70. Le plus important finalement, c’est qu’il s’agit plutôt d’un jeu autour de l’idée qu’on se fait de ces années-là. A la limite, plutôt un parfum de synthèse bluffant qu’une immersion totale dans un bain de mimétisme énervant.

Et donc, difficile d’établir une liste précise de noms susceptibles d’être concernés par cet hommage avoué. On pense davantage à la démarche relativement similaire et contemporaine de Jim Noir, son collègue de Manchester (ils travaillent pour la même boîte en déficit, Genius In A Garage Inc.).

Si on prend le soin d’élargir et d’analyser le spectre, on y trouve quelques marques de reconnaissance : le soin général apporté aux sons de basse et de batterie, quelques réflexes de folk anglais orchestré, des bouts de 1965 sur l’échelle des Beatles et des leçons tirées du psychédélisme pour les harmonies vocales. Et puis, malheureusement, à une ou deux occasions, les refrains gras et patauds des disques gras et patauds des années 70. Mais c’est suffisamment rare pour être mis sur le dos de l’humour. Ou de l’odeur du garage. Là-dessus, il chante comme un crooner qui aurait oublié que l’exagération fait aussi partie du costume. Et rajoute des chœurs sublimes, toujours bienvenus.

Ian Skelly sait écrire des chansons et ne se contente pas de gimmicks. Ce qui est d’autant plus génial, c’est que grâce à lui, je vais peut-être pouvoir passer à autre chose et chasser le dahu un peu plus loin.




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