> Critiques > Labellisés



Hasard du calendrier des sorties, ce troisième album des Norvégiens de Mayflower Madame sort le même jour que le nouvel, et à priori tant attendu nouvel album de The Cure. Balayons les choses d’entrée, je n’ai jamais été fan de la bande Robert Smith, ayant même de façon incongrue, mais à l’invitation de Michelle Soulier, assisté à une Black Session devant 200 personnes une fin d’après-midi. J’ai encore honte d’avoir potentiellement privé un fan, un vrai, prendre la place d’un curieux qui ne retiendra de cette soirée que l’immense trousseau de clés de Bernard Lenoir, et d’avoir eu l’hirsute Robert déboulé à un mètre de moi en haut de l’escalier qui menait à la scène.

Cela fait une longue tergiversation pour parler d’Insight, magnifique et magnétique nouvel album de Mayflower Madame. Après Observed In a Dream en 2016, nous croiserons le groupe en 2020 pour Prepared for a Nightmare. Ce sera l’occasion de nous offrir un titre pour le volume 52 de nos compilations, mais malheureusement aussi le titre d’album le plus prémonitoire qui soit, le groupe ne pouvant le défendre sur scène, la faute à un virus arrivé d’une ville initialement berceau de l’automobile en Chine, Wuhan, devenue l’antre de l’enfer.

L’enfer Trond Fagernes le connaîtra, perdant une fille morte née. Marqué (comment l’être autrement) par cette infamie qu’est la perte d’un enfant (deux chansons parlent directement de ce sujet Ocean of Bitterness et Insight for the Mourning Hours ), il se remit au travail avec Ola .J Kyrkjeeide (batterie) s’adjoignant des contributions de Kenneth Eknes (synthé) et de Rune Overby (guitare), tentant d’exorciser ce malheur via la musique. Insight, qui est dédié à sa fille est un disque sombre, un disque de post punk ravagé de l’intérieur, mais canalisant cette tension pour aboutir à des constructions amples et tétanisantes de beauté. Je n’avais peut-être pas entendu un tel disque depuis le premier album d’Interpol, mais ici, le costume cintré est remplacé par un bleu de chauffe et une rage perceptible, Trond tentant de faire peur aux maléfices qui le poursuivent (Crippled Crow). C’est un précis de post-punk de néo-psychédélisme dans une atmosphère dark qui à l’instar des peintures du maître Soulages fait jaillir la lumière des reflets des aspérités. C’est un disque massif, une messe païenne noire pour s’éloigner du mauvais sort par la lutte. Grand disque d’un duo qui s’il ne pourra faire de l’ombre à l’astéroïde envoyé par Robert Smith, pourrait fragmenter les adeptes d’un style que les Norvégiens peuvent légitimement porter en étendard. Terrassant.




 autres albums


 interviews


aucune interview pour cet artiste.

 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.