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Pour son quinzième album sous le nom de loscil, le canadien de Vancouver Scott Morgan s’est lancé un drôle de défi. Le genre de truc dont on se demande un peu, surtout quand on se trouve à mille lieux de quelque capacité créative que ce soit, d’où elles peuvent bien sortir, comment une telle idée prend forme, se développe et dans quels bains obsessionnels successifs elle baigne au fil du temps.

Scott Morgan a, dans un premier temps composé (je cite) : « un morceau orchestral très simple pour un orchestre de 22 instruments ». Il l’a ensuite fait enregistrer à distance par un orchestre de Budapest (ne pouvant s’offrir qu’une session unique de 30 minutes) avant de la faire presser sur un vinyle 7’’. Unique, bien entendu. De ce support physique, il a ensuite re-décomposer, re-découper, et re-numériser ces enregistrements pour élaborer l’intégralité des sons avec lesquels les dix morceaux de Clara sont composés. La démarche, au delà d’un bon niveau de dinguerie intrinsèque, fascine encore plus par la profondeur, l’ampleur et la force du résultat final. Sur la base de ce nouveau matériau brut, et sans renier ses principes de base, de boucles, d’oscillations (le nom de loscil provenant de la fonction « looping oscillator » en language CSound), de drones ( particulièrement perceptibles et efficaces sur le sublime morceau éponyme qui referme le disque), Scott Morgan étend encore ainsi le champs sonore avec une ampleur des cordes inédite affirmant un peu plus la dimension onirique, follement cinématographique de ses compositions, comme sur l’inaugural Lux magnifiquement mis en image comme une extension du sublime artwork du disque.

Ce travail de variations, de nuances de restructurations ou déconstructions des effets de cordes (notamment sur Flamma), et un soin toujours très présent à la création de samples garants d’une base rythmique pour assurer la progression des morceaux (par exemple sur Sol), permet à l’ensemble de ne jamais tomber dans une forme de redondance ou de monotonie lisse sans aspérité et à chaque morceau de se déployer pleinement comme sur Stella ou sur Aura, deux des très grands morceaux du disque.

Clara est un de ces disques qui attrapent, retiennent, fascinent, obsèdent. Dont on ne sait pas trop à quel moment il va quitter la pile des disques qui ne sont jamais à plus d’un bras tendu de la platine. Ces disques que chaque écoute entraine un peu plus en son sein, au plus près de sa pulsation créative, sensible, sensorielle et vivace. Peut-être parce qu’elle rapproche de celle qui nous constitue aussi dans le fond et nous aide à vérifier sa présence. Ce point d’inflexion vital entre ombre(s) et lumière(s), dérive mélancolique et allant lumineux. De cette émotion brute que seule la beauté pure de certaines œuvres nous permet d’effleurer. Clara est de cette trempe là, un des grands disques de 2021. Au moins.

A Découvrir Absolument.




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