Nous n’irons pas plus loin me disait le capitaine, trop d’obstacles disait il. Mais nous voulions avancer quitte à nous perdre dans les brumes recouvrant des plaines ou des étendues maritimes à l’horizon incertain.
Nous prîmes alors le « Flux » de Close Talker. Les poumons gonflés et la cage thoracique comme une figure de proue fière et altière nous rejoignirent ces canadiens pour un voyage loin du tumulte des bruits qui se fracassent contre les murs. Close Talker nous ouvre le chemin, chassant les brumes, les nuages bas d’un revers de la main, via une combinaison rythmique, par une aspiration cuivrée, ou en prenant le maximum d’air pour chanter en limitant l’effort, en ne jouant pas avec les forces.
« Flux » n’est pas un port d’attache, le disque ayant largué les amarres pour un voyage sans retour, oubliant sextant, boussole et bulletin météorologique. Sans jamais tomber dans le lyrisme pompier de pas mal de voyageurs, Close Talker ne se prive pas de sortir la grand voile pour se donner de l’air et pour accélérer l’avancée vers un autre nulle part.
Jouer une ode sur le silence en deux parties quand on est un groupe est quelque chose d’étonnant, mais au combien respectueux de l’espace dans lequel il se déplace, et nous avec lui. « Flux » d’un certaine façon est un « Laid » de James sans les écarts de tenue de Tim Booth, Will Quiring est comme aimanté par la retenue (parfois peut être trop) face à l’immensité des émotions proposées.
Sans être austère, « Flux » aurait parfois gagné à se faire emphatique, à jouer le jeu du grand spectacle. Mais comment reprocher à un groupe un tel voyage, au grés du vent, du temps, des éléments, passant sur les humeurs d’un capitaine qui au final partira aussi avec eux, guidé qu’il sera par l’immensité de « Flux ».