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Il y a une élégance dans ce coup, le protocole de la douceur quand elle use de la violence. Et je vous remercie pour cette éducation de l’élégance, Trent, cette éducation qui s’est forgée dans mes reflux obscurs de Marc Seberg et d’une certaine idée du chemin a prendre pour que le rock français gagne ses petites batailles navales, sur les navires Bashung, Manset, Eicher, et tous ces crieurs d’âmes plus osés encore, plus technologiques, plus sombres ou plus commerciaux qui protégeaient l’hexagone du péril droits sur leurs portés comme colosses de Rhodes. L’élégance est savoir placer sans extrême la bonne parole sur la bonne musique, ne pas trop en faire, ne pas rester court, et si la musique dit la même chose que la voix, l’élégance se transforme en art, petit art puisque la jeunesse et fraicheur de vos chairs ne vous laisse pas encore user des émotions. Je vous parle de douceur et violence, ces thermes ne sont pas opposés en musique, et cela vous l’avez déjà appris, la guitare aura ses rages, la batterie ses crachats, la basse aura son obscurité et la voix, sa colère en même temps que la guitare aura ses baisers, la batterie ses vents chauds, la basse aura sa caresse et la voix sa soie. Je trouve en vous, Trent, la diplomatie du plaisir, un savoir faire pioché dans les sacs des grandes pointures d’ici et d’ailleurs, la politique de la sagesse, on ne va pas vous heurter, mais vous allez nous sentir passer, ce clair obscur que Philippe Pascal savait ciseler comme diamants au-dessus de Marquis, ce contraste qui permet d’augurer les désirs de tout public, assez propre pour ne pas écœurer, assez sale pour ne pas anesthésier.

C’est un équilibre difficile, et c’est pour cela que je parle de vous en thermes d’élégance, puisqu’il s’agit de ça, cet album regorge de futur, de grands horizons, « sur la cime » est une réussite, et dieu que je pèse mes mots, puisque j’attends toujours plus de la musique, votre « Décembre » est ivre de mémoires auditives de rock anglo-saxon mais sent le récent comme une chanson française inoubliable.

Vos mots ont la rythmique d’un sentiment, sauvages en bouche, et tristes aux ouïes, de phrasé appliqué (j’y trouve du Bauer, et à moi, Bauer (époque sentinelles) me plait, du Black Maria aussi) et puis j’aime sentir le musicien derrière l’instrument, et ce disque est parfumé par chacun d’eux, cinq parfums dont l’arôme emmêlé est un accord parfait, parfum élégant, fleurs acides et sucs sucrés pour base nasale. Vous m’avez demandé ce que je pensais de cet opus, voici ma réponse, l’amour que j’ai pour cette éducation sonore ne peut qu’apprécier au plus haut point votre travail, mais attention, l’élégance est un ouvrage de jour a jour, et demain une rature et l’écrin se rompt, le parfum s’évade, soyez vigilants a vos équilibres, gardez les yeux fixes sur la cime, et vous l’atteindrez.

Quand a vous, lecteurs, ne lisez pas, écoutez-les. J’arrête mes mots là, sur ces « On croit encore », « Le gout amer de tes lèvres », « 11.03.2004 », « Que cela te plaise ou non », écoutez-les pour commencer votre propre petite éducation de l’élégance, découvrez le protocole du plaisir.




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