Délicat comme une tristesse, ce son s’immisce sous la peau, chemine au hasard des chairs de poule, se perdant et se retrouvant le long de nous. Délicat et nous devenons fragiles comme ce bruit de verre a l’instant même de toucher terre qu’est la voix d’Inne, contant contes tirés violemment de rêves, qui se résistent a être cauchemars. Les couleurs d’Amatorski se déversent sur nos âmes, nous rendent aériens, volubiles, gaz hautement explosifs, nous disent nos faiblesses, nous rendent nos erreurs, nous sommes si peu de choses, nous sommes si peu, mais nous avons tant, tant de lumières pour autant de tunnel
Délicates ces mélodies de valses lentes, moderato aux émotions, matinées de brumes belges, et ces ciels toujours plombés, et ces vies si sages si monotones, qu’on essaye de briser d’un peu d’envies, de pincement de guitare et grogne de pianos. En nous, juste là, sous la peau, cette tristesse qui se promène en cherchant la sortie semble se gonfler a l’approche des nerfs, on sent naitre la colère sous les fragiles accords, et cette lutte fragile-violence devient épique, guerre dans les airs, bombardements tous-terrains, course poursuite entre nous et nous-mêmes, on se chuchote nos maux en effleurant presque le jazz des caves enfumées, des blues d’Europe intime, ou raffinés se déposent des compositions somptueuses de velours et soies tissés de petites perles étincelantes. On sent la chaleur dans la sensible flamme qui ose éclairer les palais abandonnés, aux souvenirs si délicats, délicat, délicatesse.
J’ai beau chercher des mots, j’ai beau avoir peur d’eux, c’est délicat qui revient a chaque bribe de chanson, a chaque jolie rage, a chaque cruelle beauté, d’un bout du disque a l’autre face, les arguments, les instruments, les doigts sur les cordes et l’ivoire, berceuses et prières du soir. On se sent parfois si bien avec cette tristesse là, qui chemine sous nos épidermes tranquilles, même quand les créateurs osent l’aventure de la différence, de la surprise d’un vieux rock triste d’amour en temps de guerre, d’un soundtrack surréaliste de cinéma déserts, tout revient a cette fragilité soul, a cet effacement calme qui marque un début qui n’en finit pas. Délicat est TBC, précieux dans ses instants éphémères, sensible petit objet entre ombre et lumière, coffre de souvenirs inoubliables comme ce matin, ce moment là, ce mot, ce parfum dans l’air, cette ligne dans le ciel, ces petites choses, ces riens qui sont tout.
Petite boite a musique de nos âmes aux heures tristes.