> Interviews



Interview réalisée par Gerald de 0liveira en décembre 2004.

Merci à David Gedge et à Tchiki-Steph et sa compagne pour la traduction.

Je ne vais pas vous cacher que si je devais retenir quelque chose dans des années un moment dans cette vie de "webzineur" cela restera cette interview même réalisée par mail. Si depuis deux ans David continue à m’envoyer la discographie ce cinerama il m’était impossible de pouvoir imaginer un jour lui parler du retour du Wedding Present. Alors cette interview est avant tout celui d’un ancien étudiant qui a grandi sans jamais renier une discographie que le temps ne parviendra jamais a ecorner. Rien que pour cela merci David.

Tu n’as pas souffert du manque de retour dans un pays comme la France (qui adorait le Wedding) avec Cinérama. Je me souviens du festival des Inrocks ou de passages chez Lenoir, et pour Cinérama plus rien. Tu expliques cela comment ?

— Je ne sais pas, je te retourne la question ! Peut-être que le son de Cinerama ne correspondait pas au public français. C’est dommage, car nous adorions venir jouer en France. Nous avons deux ou trois dates chez vous l’année prochaine, ça va être bon de revenir .

D’ailleurs le réseau indé existe t il toujours pour toi , ou est ce une vieille marotte qui nous fait rêver ?

— Tout dépend de ce que tu entends par "Indépendant". Etre sur un label indépendant ? Avoir le son de guitare des groupes indépendants ? Beaucoup voyaient le Wedding Present comme l’archétype du groupe indépendant, même après qu’on ait signé chez RCA. Pour moi, ça se rapporte à une certaine façon de penser…une façon de faire des disques en dehors du courant du moment…et, dans ce sens, je pense que ça existe toujours .

Ce retour du Wedding c’est le retour aux guitares plus agressives même si elles existaient encore parfois chez Cinérama ?

— Absolutement. (en pseudo français dans le texte)

Quel a été le déclencheur de cette reformation ?

— Quand nous avons terminé Torino, nous pensions tous que nous allions commencer à travailler sur le 4° album de Cinerama. Cependant plusieurs évènements se produisirent. Premièrement Sally, la cofondatrice de Cinerama, a quitté le groupe et nous ne l’avons pas remplacée...et deuxièmement, la musique a commencé à changer. Je pense que Torino est l’album ultime de Cinerama. C’est le point culminant du projet que j’ai démarré lorsque j’ai mis le Wedding Present de côté en 1997...je suppose donc qu’il fallait que je passe à autre chose. Les morceaux que nous avions écrit après Torino sonnaient de plus en plus comme le Wedding Present, cela en était arrivé au point où lorsque nous faisions un concert ou une session radio, les gens s’étonnaient : "Pourquoi ce groupe s’appelle-t"il Cinerama ? ça sonne comme le Wedding Present !". Il était donc devenu évident que les nouveaux morceaux devaient sortir sous le nom de Wedding Present.

Le retour du wedding c’est pas aussi pour toi de pouvoir avoir une palette plus grande pouvant passer de silver shorts au fameux bikini du collector de watusi ? c’est pas ce qui manquait à Cinérama ce grand écart ?

— Pas vraiment...en fait Cinerama était le groupe qui devait me permettre une plus grande versatilité. J’ai toujours aimé les autres styles musicaux...musiques de film, pop, surf music...mais le Wedding Present était tellement établi comme groupe de rock indé qu’il était parfois difficile de se lancer dans ce type d’experiences. Il m’aurait fallu convaincre les trois autres. J’ai donc créé Cinerama pour pouvoir me laisser aller... .

Comment va se passer le processus d’écriture pour le nouvel album ?

— Toutes les chansons du nouvel album sont nées sous la forme de petites mélodies de guitare venant de moi-même ou de Simon Cleave, et je les ai embarquées pour y ajouter le chant...et des arrangements quand c’était nécessaire. Notre bassiste Terry a pour sa part ajouté les choeurs. La différence majeure entre Take Fountain et les albums de Cinerama est que dans Cinerama chaque morceau a été écrit avec une idée précise de ce que serait son orchestration...cordes, cuivres, pianos, clavecins...il y a probablement une telle orchestration sur chaque morceau de Torino, alors que pour Take Fountain l’orchestration passe au second plan.

Cinérama est il simplement mis en parenthèse ?

— Je suppose, oui, car si tout se passe comme prévu nous serons en tournée début 2005 sous le nom du Wedding Present. Mais après la tournée, qui sait comment sonneront les nouveaux morceaux ? Cela sera peut-être du Wedding Present. Cela sera peut-être Cinerama à nouveau. Cela sera peut-être une idée totalement nouvelle. Je ne sais pas.

Question idiote, mais la poussière chez toi dans ta maison est elle présente (référence au geste systématique que tu fais en brossant la couverture d’un revers de la main) ?

— Etre une rock star est une sale occupation... .

Pour beaucoup le passage du WP à Cinérama était simplement un changement de nom. Du dirais quoi pour prouver le contraire ?

— Je ne pense pas avoir à prouver quoi que ce soit, vraiment. J’ai simplement fait un nouveau disque du Wedding Present. Si je l’avais sorti sous le nom Cinerama je pense que les gens auraient été un peu perdus...peut-être même déçus. Je ne veux pas appeler quelque chose vin rouge si c’est de toute évidence du vin blanc !

Tu juges comment l’état de la scène anglaise ? un groupe comme Franz Ferdinand sincèrement cela te remue ?

— Franz Ferdinand est un très bon groupe pop, ouais ! Je pense que la scène britannique est plutôt excitante en ce moment...pas mal de groupes à guitares rageuses semblent éclore de partout, et je pense que c’est très sain. J’ai vu les Libertines au Festival de Reading cette année et ça m’a vraiment touché...il y avait l’agressivité, la passion...ils tiennent quelque chose de spécial.

Pourrais tu changer de format et abandonner la pop pour te lancer dans un projet expérimental ? Pourrais tu par exemple te passer des guitares ?

— Oui. Dans le premier LP de Cinerama, Va Va Voum, la guitare avait un rôle vraiment secondaire. Je suis simplement intéressé par les sons, peu importe d’où ils viennent...chanteurs, orchestres, claviers, ordinateurs....

Avec Cinérama l’image avait plus d’importance je crois, même si avec les clips de hit parade vous aviez montré de réelles prouesses avec le wedding. C’était voulu ce coté glamour ?

— Oui. Personnellement j’ai toujours pensé qu’il y avait dans la pop music beaucoup plus que la musique elle même. Il est intéressant de voir à quoi ressemble tel groupe et ce qu’il fait passer dans ses pochettes d’albums et ses clips. Cependant, je n’ai pas toujours pu façonner l’image du Wedding Present à ma guise, puisque le groupe était plus ou moins une démocratie. Pour Cinerama, c’était différent, étant donné qu’il s’agissait au départ d’un projet solo, j’avais beaucoup plus de contrôle sur ce qu’on faisait et sur notre look. Le cinéma et la photo m’ont beaucoup influencé .

Es tu toujours féru de cinéma ?

— Oui. je pense que même le nouvel album du Wedding Present possède un côté cinématographique. En réalité, je suis simplement un grand fan de culture pop en général. Ciné, musique, B.D....ces choses ont toujours trouvé plus de sens à mes yeux que la culture traditionnelle, comme la litterature ou le théâtre .

La question ultime reste quand même celle-ci, peut on vraiment écrire une bonne chanson sans parler d’amour ?

— Je ne dirais pas que c’est impossible...mais je pense que les choses dont je parle dans mes chansons se prêtent parfaitement à la pop music. Toutes mes chansons préférées sont des chansons d’amour. J’ai essayé de me lancer dans d’autres sujets mais je n’ai jamais été content du résultat. Je n’ai pas de scrupules à ce propos .

Pouvais-tu reprendre le Wedding sans idées de remettre le couvert en studio. C’était impossible pour toi de revenir comme une tournée de reformation à la Pixies ?

— Il ne s’agit pas de " revenir " car je ne suis jamais parti ! Mes deux groupes ont simplement fusionné l’un avec l’autre. Pour le moment, j’ai choisi de travailler sous le nom de Wedding Present. Une tournée sans album n’aurait pas eu de sens à mes yeux, car je ne vois pas l’intérêt de se contenter de jouer de vieux morceaux pour l’argent !

On c’est croisé un soir à Reims en 1994 et avec une gentillesse rare tu as accepté de reprendre le soir un morceau de Watusi. C’est pas en fait ton moteur, une gentillesse greffée sur l’électricité des cordes de ta guitare ?

— Je n’ai aucun problème relationnel avec les gens qui écoutent ma musique. C’est bien souvent très enrichissant d’écouter leurs commentaires. Je ne comprends pas ces groupes qui passent leur temps assis dans les loges sans jamais échanger un mot avec les gens qui paient pour qu’ils bouffent.

Le mot de la fin sera pour moi, pour te dire combien cette itw est important pour moi car sans des gens comme toi Bob Mould, Will Oldham ou Lou Barlow je crois que le milieu indé ne voudrait rien dire. Merci pour cela et pas seulement ?

— Tout le plaisir est pour moi ! Je suis simplement heureux d’avoir apporté ma petite contribution à la scène indépendante…

Je peux pas te quitter sans te demander un mot sur John Peel ?

— Hmm…comme tu peux l’imaginer, sa mort m’a profondément choqué et contrarié. Hormis le fait qu’il présentait le programme le plus audacieux de toutes les radios du monde, il eut une influence énorme sur ma vie. Loin d’être un arriviste, il ne tenait pas compte des campagnes de pub des grosses compagnies du disque. Si il aimait un disque, il le diffusait, c’était aussi simple que ça. Tu pouvais donc entendre dans son émission des trucs que tu n’aurais jamais entendu ailleurs. Je peux en parler puisque je n’ai quasiment jamais raté une émission depuis la fin des années 70. Lorsque j’étais à l’étranger, je demandais à des amis de me faire des cassettes. Je regrette de ne pas avoir pu mieux le connaître. Les gens racontent que j’étais un de ses amis et, en effet, j’ai été à pas mal de ses soirées d’anniversaire, nous avons dîné en ville quelquefois et il m’est même arrivé d’être hébergé chez lui…mais il y a toujours eu une certaine distance entre nous. Mais comment être ami avec quelqu’un que tu respectes tant ? J’étais tellement habitué à entendre sortir sa voix de mon poste de radio qu’il m’était difficile de l’entendre émaner d’une tête humaine sans être troublé. Bien qu’il ait toujours été chaleureux et amical envers moi, j’avais toujours un sursaut de panique lorsqu’il arrivait. Assurer un concert en sachant qu’il faisait partie du public était plus éprouvant pour les nerfs que de jouer devant 20 000 personnes au festival de Reading. En fait, j’avais beaucoup moins de mal à parler à sa femme, Sheila. Quand je lui en ai fait part, elle m’a parlé d’un tableau Chinois sur lequel deux personnes se courbent à l’extrême pour exprimer leur respect mutuel, à tel point qu’ils sont incapables d’entretenir une vraie amitié.