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Interview réalisée par mail en mai 2005

Une certaine idée de l’élégance

Toute nouvelle signature de l’excellent label Microbe Records, Barbara Carlotti enivre ses auditeurs de sa voix grave et détachée et il n’est guère de plus belle ivresse que de voguer en sa compagnie vers Cannes ou Tunis pour y retrouver les fantômes d’une époque empreinte de l’élégance accessible.

Si je te dis que j’ai découvert ton univers par un sourire complice avec le prof de philo qui parle des mouvements du cœur, ca t’évoque quoi ?

— En fait, c’est extrait d’une longue interview d’Henry Miller mise sur disque par l’INA que j’ai découpée et mise à plusieurs endroits dans la chanson et cette voix est celle de l’animateur radio qui pose des questions. Et puis je trouve ça assez poétique, les mouvements du cœur.

Et la voix très détachée de cet animateur correspond bien à ton univers, je trouve. Il y a là un certain côté suranné et sans prise de tête excessive…


— Oui, en tout cas il y a une certaine simplicité dans mes textes et dans ma musique, il y a aussi un certain minimalisme sur certaines chansons. J’ai avant tout le souci de rester simple et accessible, je ne suis pas très ambitieuse sur la musique, je recherche surtout des ambiances.

Et de la nonchalance aussi…

— Un peu oui, ça doit faire partie de ma personnalité, il y a surtout une distanciation un peu feinte, au fond j’essaie de toujours rester sincère dans les textes que j’écris, à transmettre de vraies émotions et j’admire avant tout une certaine élégance que nous avons aujourd’hui perdue. On n’a plus de cette sophistication et de cette liberté qui régnait dans les sixties, même dans la chanson yéyé. Derrière chaque chanson, tu avais toujours un auteur-compositeur et un arrangeur, et derrière la légèreté se cachait une certaine qualité.

Avec des gens comme Burt Bacharach par exemple…

— (enthousiaste) Oui c’est ça ! Quand tu penses à un album que j’ai découvert récemment, l’album de Colin Blunstone, le chanteur des Zombies, on y trouve des arrangements pour cordes absolument ma-gni-fiques, presque brahmsiens. On sent qu’il ne fait pas les choses n’importe comment, qu’il y a un type cultivé derrière. C’est clair que ce que je fais est plus minimal mais ma préoccupation est de faire quelque chose de musical et qui me plait.

Et vu l’état de l’industrie du disque qui n’est pas très encline à prendre des risques, ça ne risque pas de changer de si tôt.

— Oui, il n’y a plus vraiment de grands producteurs à la Phil Spector. Les gens qui s’occupent de musique sont plus des vendeurs de yaourt que des vrais musiciens, ce ne sont en tout cas plus des grands arrangeurs comme c’était à l’époque. Il y a bien Bertrand (NdR : Burgalat) mais il manque de moyens. Tous les labels avec une identité forte se cassent la gueule, c’est un mystère.

Revenons-en à ces ’Chansons’, c’est plus un EP qu’un album.


— Oui, en fait c’est plus pour annoncer un album qui sortirait en janvier 2006. Je pense que je vais de nouveau travailler avec Bertrand, mais aussi avec Olivier Libaux que j’ai rencontré récemment et je vais participer à son prochain disque. C’est un très bon guitariste, il sait composer des chansons simples et accessibles tout en conservant un certain niveau de qualité dans les arrangements et l’écriture.

Et tu t’imaginerais travailler un jour avec Katerine ?

— Je ne sais pas. Je vais peut-être dire des bêtises mais je ne pense pas que Katerine puisse écrire des arrangements pour cordes comme Burgalat le fait. Mais je vais bien chanter tous les duos du monde avec lui et lui, c’est un vrai nonchalant quand il chante. "

Et d’où vient cette envie musicale ?

— Pour tout te dire sur mon parcours, j’ai commencé à chanter du jazz, j’ai fait un DEUG de musicologie, j’avais un duo de jazz avec un pianiste. Parallèlement à la musicologie, j’ai découvert l’opéra et c’est vraiment devenu une passion à l’époque, à tel point que j’ai pris des cours de chant lyrique au Conservatoire. Seulement, j’étais vraiment écrasée par le poids des grandes chanteuses de lyrique et de jazz et je n’arrivais pas à trouver ma voix au milieu de tout ça. Depuis très jeune, j’écrivais des poèmes et un jour, je me suis dit que je devais combiner les textes et la musique. A la base, je suis assez timide et quand j’ai commencé les cours de chant, j’étais terrifiée, je pleurais et quand à 18 ans, j’ai annoncé que je voulais être chanteuse, tout le monde a été très surpris. Adolescente, je chantais beaucoup mais seulement pour moi et au fil du temps ça s’est révélé. J’ai arrêté ma carrière d’agent pour des groupes de jazz et pendant un an et demi, j’ai écrit des chansons. J’ai alors rencontré Jean-Pierre, le guitariste sur le disque, et il m’a présenté M. Untel qui m’a invité à faire des premières parties sur ses concerts. Après quelques soirées bien arrosées, on est devenus amis.

Tu es finalement assez connue à Paris…


— J’habite à Paris depuis longtemps, j’y donne beaucoup de concerts et j’aimerais bien en sortir un peu. Mais comme la plupart des concerts sont calés jusqu’en juin, ça ne sera pas avant la rentrée.

Et dans les trucs que tu adores ?

— Arnaud Fleurent-Didier, j’adore la chanson Rock Critic, j’adore aussi An Pierlé, Feist, ce sont des choses assez commerciales mais très réussies. Et je suis une fan absolue de Joni Mitchell, j’ai tous ses disques.



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