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Beaucaire (belle pierre) (Bèucaire en occitan) est une commune française située dans le département du Gard , région de Languedoc-Roussillon, sur la rive droite du Rhône, proche du centre du triangle que forment Avignon, Nîmes et Alès. Plus de 15000 habitants (Beaucairois) y passent cet instant qui va du jour á la nuit, du berceau au caveau, avec une jolie nonchalance. Sur une colline élevée se trouve un château de tour triangulaire, je n’arrive pas a lire son nom, un pont bleu traverse le fleuve, une vielle horloge sculptée sur le fronton de l’église s’est arrêtée il y a des années, des siècles. Ces courses camarguaises de taureaux voient plutôt circuler des vaches, ses terres touchent enfin au canal du midi, petit port fluvial, soirées dansantes de petits vieux, foire de l’ascension, festival "Chante a Beaucaire"... Mais qu’ont-ils fait pour s’y perdre ? Qu’est-ce que Beaucaire vient faire ?

Beaucaire, ça sonne comme ces vieux casinos de plages du nord, Deauville, Trouville, Etretat, ces termes pour rides tranquilles, ces lieux ou le trop plein de paix épaissis les nuages gris et l’eau caillouteuse et gelée, l’exotisme des côtes froides, mais non, Beaucaire est ailleurs, et si on le prononce bien, ça sent le sud , le rosé, le feu de l’astre et les voix hautes, les voix fortes, le bon vivre, le farniente et l’odeur des bodegas espagnoles… humm, ces soupes au poisson… mais que sont-ils aller faire là, que c’est-il perdu a Beaucaire ?

Le soleil, il y a un seul truc qu’un groupe ainsi de chaleureux, c’est de trouver le soleil pour tous ceux qui le perdent, ce soleil qui teint les murs de farniente, de calme, d’horizons sans fractures. Le soleil, ce sont ces sons aigus, légèrement oniriques, d’une fatigue souple, psychédélisme mielleux d’étés sur les plages de la Camargue, étendues sans fin de terre blanche et eaux bleues. Woody Murder Mystery est un été d’il y a longtemps qui vient passer le temps au présent, sans en arriver a cette folie douce de Kula Shaker, sans en arriver non plus a être de ces typiques orchestres des 70 (heureusement), les WMM viennent nous faire passer un bon moment dans les limbes de tout-un –chacun. Les mélodies au rythme très appuyé, scandé jouent sur des nappes superposées comme des fumées d’encens, un zeste d’Hippies, un zeste sensuel, un zeste liquide et un autre air. Beaucaire est dés lors un lieu de résidence spirituelle où tout le monde peut entrer le temps que dure le disque, et y trouver sa propre chaleur, les termes de Deauville etc. ne sont donc pas si loin, ni l’exotisme, en fait, la notion d’endroit s’enfuit de toute part dans ce travail voué au bonheur, a la légèreté, a l’esprit, une certaine liberté du corps, on appellera çà le bien être. Au niveau musical, puisqu’il faut s’obliger a parler de trucs terre a terre même si ce disque n’est qu’aérien, on dira que les oreilles se régaleront de ces arpèges simples, certes, mais qui, strates a strates, couches a couches, donnent un ensemble plus complexe que ce que nos WMM veulent laisser croire, ces orgues vieillottes ne sont pas toujours faciles de nos jours, elles paraissent parfois péjoratives, mais utilisées comme c’est le cas ici, elles sont impériales, donnant le contre coups de ces guitares de tempes sèches et ces rythmes marqués, elles sont la part spirituelle. Quand a la voix, les voix, l’une narrative, la masculine, moins utilisée, et l’autre plus sirène, la féminine, elle est simplement éther, comme il se doit pour ce style, c’est plus angélique que démoniaque, c’est plus une intonation qu’une puissance, c’est plus une sensation qu’un texte (ce qui ne signifie nullement que les textes soient vides, ils déclinent l’amour avec du miel et des lumières a volonté). "Lost in Beaucaire" est alors véritablement une perdition, dans un lieu tout gentil du sud, une perdition sensorielle et corporelle (j’en ai même bougé les hanches), un petit effet extracorporel qui nous fait toucher le soleil, l’eau du port et les visages des passants sages. Voyez-vous, en étant franc, je n’aurai jamais pensé écrire un jour sur cette manière musicale, je ne parle pas de style, sinon de la manière de concevoir la musique, jusqu’ici il m’était assez difficile de ressentir quelque émotion que ce soit dans ces steppes chaleureuses un peu baba et trop ensoleillées pour ma peau blanche, mais on est jamais a l’abri d’une chair de poule. C’est ce "When will you sleep" qui m’a emporté, superbe composition et parfaite harmonie de tous les instruments, et cette impression d’ombre sur la face du soleil, avoir l’impression qu’il faudra racler plusieurs épidermes pour trouver une profondeur a laquelle on ne s’attend pas toujours dans ces jolis psychédélismes. Je me suis étonné, et tout ce disque m’a emporté, à divers degrés, loin de toute matière. Peut être alors suis-je passé prés de Beaucaire que ce soit au sud ou au nord, j’en ai admiré les étendues, les ports et l’horloge morte au clocher. L’important, n’est pas toujours où l’on se perd, ni comment on c’est perdu, l’important est parfois de ce perdre. Alors voici la raison de Beaucaire, Beaucaire signifie partout ailleurs sur terre ou pas, Beaucaire c’est un esprit qui n’a pas pied, qui n’a pas corps, un bienêtre sans points sur la carte routière, Beaucaire c’est nulle part et partout, là où la musique dirige l’âme vers le simple bonheur. Si un jour vous êtes trop chez vous, accroché au monde réel, tentés de vous perdre du côté de Beaucaire, en musique.




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