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Un jour, il faudra élever un monument à Elbow, mais pas une statue léchée de granit fin, pas non plus du dernier style artistique du moment, quelque chose d’irréel et d’eternel. Une statue toute simple, une figure allongée de Giacometti, un mat de bateau cloué au monde, un bouton géant de manteau de flanelle qui réchauffe a n’en plus connaitre d’hiver, une simple note de musique sur le socle d’un cœur, une balançoire sur la lune. Quelque chose de tous les jours qui rendent les jours divins, magnifiques. Il faudra remercier les Potter, Turner et Garvey pour la magie chronique de leurs œuvres, qui fait, comme tout art, que nos 70 ans décomptent 65 ans, que nos peaux redeviennent neuves dans leur froissée, et que nos sourires soient a nouveau tirés a quatre épingles. Oui, un monument, peut être une fontaine, pour être source de vie, de ces fontaines que l’on trouve au milieu des places de nos villages et disparaissent dans les grandes villes, une fontaine pour son débit harmonieux et frais, transparent comme diamant, au centre de la place de nos âmes, en ce cas, pour ce disque, du moins, une fontaine de jouvence. Il faudra les remercier de ne pas tenter d’être dieux, mais d’offrir toujours plus qu’eux. Merci d’être humains, erratas et éclats, et de nous faire sentir l’humain juché en haut des toboggans, de 5 a 70 ans. Il faudra les applaudir pour nous fournir ce regard que l’on pose sur les lueurs, de nous donner ces paumes de mains pleines de trésors, riches de tout, riches de joues, enfin, de nous régaler la simplicité du bien-être, le basique de la vie, la matrice des rires pas forcés qu’arborent les gens heureux. Il faudra les embrasser comme leur musique nous embrase, ces berceuses pour vieillards et moins vieillards, ces hymnes pour nouveau-nés et moins neufs, en somme, pour ceux qui croient que les rêves ne naissent pas des jours, sinon des vies, ceux qui croient que les rêves, sont chansons. Il faudra la révérence comme il l’a fallu la tirer a toutes ces merveilles laissées en offrande jusqu’ici par nos bons amis de Bury, près de Manchester. Nous allons, sans douter, sans nous efforcer et surtout sans mentir, nous rendre au chef d’œuvre, ces musiciens là, ont le feu sacré, dressons déjà les poutres de leur monument.

Si la voix de Garvey est toujours aussi bienfaitrice, puissamment fragile, de sensibilité bénévole et granulé aurifère, l’ensemble varie, ou plutôt progresse, vers la peau réelle de l’émotion, moins de superflue, plus d’intensité (Mettons a part "Magnificent (She says)", hymne pour une éternité ou deux). Tout est là, la raison de ce monument, de cette statue que j’érige, la beauté atteinte a le visage de chacun d’entre nous quand nous aimons, un fils, une mère, un lieu, tout. Là est l’art d’Elbow. Leurs mélodies calmes pénètrent les forteresses osseuses, la chair et touche du doigt les tissus de l’âme, des orchestrations sans pompes mais éloquentes, le plaisir calme et serein des petites symphonies personnelles, des envolées lyriques compréhensibles, des zestes classiques dans l’alcool de bars, et des voyages d’aller-retour a nos enfances, quand le simple était soleil. Elbow continue a jouer son rock tranquille, épique, généreux et sensoriel, ce coup ci avec un grain d’ingénue, de naïf, qui leur donne une fragilité sublime. Le groupe joue sur cette ambigüité du puissant et du faible, joue sur la tristesse et l’allégresse, joue sur le contraste sans bouleverser, avec tendresse et respect. Ce même respect qui devrait, à la longue, élever des monuments dans les cages thoraciques de chacun d’entre nous.




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