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A force d’entendre des formations françaises puisant dans l’axe cold wave, on commençait à pointer du doigt la prédominance de la forme sur le fond. Car généralement, depuis deux ou trois années, la France se rêve The Cure mais n’en retient que les contours, la basse gallupienne ou les synthés désolés. Moins qu’à la nécessité, la cold wave tricolore fonctionne aux souvenirs adolescents ou au « Jacques a dit », rarement au confessionnal… Dans le cas de L’Ordre d’Héloïse, il suffit d’une seule écoute de leur nouvel album (bien nommé « Le Chaos de l’histoire ») pour comprendre que ces lillois se moquent éperdument de l’hommage 80’s. Trop de ressassements morbides et de complaintes endeuillées pour ne pas accepter l’immersion dans cet amas de pensées cassées, en friches, mal embouchées. Les titres parlent d’eux-mêmes, tous portés par l’attirance du crépuscule : « Recueil de nuit », « Le Verset noir », « Extinction des cieux » ou l’explicite « Même le noir s’est assombri »… Une honnêteté macabre qui se vérifie par le choix de la langue française. Car L’Ordre d’Héloïse ne s’abrite derrière aucun paravent. A peine si la voix se laisse avaler par le minimum de distorsions. Du coup, qu’importe de comprendre ou pas le sens des paroles : le chant est tellement apeuré, magnifiquement troublant, qu’il sert de guide fraternel. Comme un Lucie Vacarme érigeant l’album « Faith » en guise de Nouveau Testament.

Ne pourtant pas croire en un malaise tellement plombé que recroquevillé dans une douleur par et pour soi-même. On ressent une ouverture dansante, un besoin de lucidité et de clairvoyance. L’Ordre d’Héloïse, sur ce point, évoque le passage de Throbbing Gristle à Psychic TV ; lorsque Genesis P-Orridge, plutôt que de poursuivre les lamentations, choisissait d’accorder le noir à un souci d’accessibilité tout à fait naturel…

A l’instar des récents albums d’Emmanuel A. et de Tomek, « Le Chaos de l’histoire » est un marécage qui ne triche pas, un gouffre intense qui accueille avec générosité et limpidité.




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