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Lygia Clark ? Cela vous dit quelque chose ? Non ... Rien

Vous avez entre les mains le dernier album de Sigur Ros, "Kveikur" ? Oui... Ouvrez-le alors et regardez les crédits notés sur la pochette intérieure et regardez la couverture du cd... L’image est extraite de l’installation interactive "Mascaras Sensoriais" (Masques sensoriels)

Tout est dit dans ces deux mots, masques sensoriels.

C’est bien ce que Sigur Ros recherche ici, l’évocation de différents masques sensoriels comme des prismes des apparences originelles.

Ce qui me vient à l’esprit à l’écoute de "Kveikur", c’est cette autre expérience artistique de Lygia Clark, les "Bichos" (Bêtes), ces sculptures où le spectateur est invité à les saisir et à leur donner des formes différentes...

Ici pas de passivité face à l’œuvre mais une relation égale où la musique se nourrit de vos émotions et réciproquement...  Revenons à l’essentiel du sujet, Sigur Ros...

Après deux albums magistraux, "Agætis byrjun" et "()" où le groupe islandais mélangeait Post Rock et musique minimaliste, Jonsi et sa bande s’ouvrent par la suite à un format plus Pop avec "Takk" en 2005. En 2008, ils reviendront avec "Með suð í eyrum við spilum endalaust" qui voudra combiner les deux versants de la montagne Sigur Ros. Des rumeurs de séparation gonflent à l’époque avec des doutes maintenus par la sortie du projet "Riceboy sleeps" de Jonsi et de son compagnon Alex Somers puis du premier album solo du chanteur de Sigur Ros.

C’est étrange comme ces deux albums sont différents. Vous avez d’un côté une ambiance qui lorgne du côté de l’ambient et pourtant nous savons que nous sommes sur des terres de volcan,de brume proche des paysages intérieurs de Sigur Ros.

De l’autre côté, nous avons ce côté très Pop qui n’est pas sans rappeler certains effets un peu vains sur "Með suð í eyrum við spilum endalaust" avec des fulgurances typique d’un certain son attendu chez le groupe islandais.

Il y a moins d’un an, Sigur Ros revient avec "Valtari", belle pièce musicale qui poursuit les travaux de "Riceboy sleeps". Certains titres osent le défi du seul caractère instrumental en laissant la voix de Jonsi (pourtant atout majeur du groupe) à l’extérieur. Cet album, c’est un peu le "Kid A", le "Low" du groupe.

Avec "Kveikur", malgré les annonces de révolution musicale, Sigur Ros revient vers des ambiances plus habituelles. L’album s’ouvre sur le bruit blanc de "Brennisteinn". Nous retrouvons tous les ingrédients, les montées et les plages planantes attendues... C’est agréable, certes, très agréable même mais assez prévisible.

"Hrafntinna" déploie des charmes entre torpeur et evnvoûtement avec une fin qui n’est pas sans rappeler "Staraflur". "Isjaki" ne convint pas vraiment avec ces tonalités Pop un peu poussives, proche de l’effort solo du chanteur.La magie ne prend pas tout simplement.

"Yfirborð" (Surface en islandais) remonte vers des climats éthérés et aériens avec une batterie aussi présente qu’elle était absente dans "Valtari". "Stormur", c’est un peu toute la discographie de Sigur Ros résumée en quatre minutes et cinquante cinq secondes. La tempête est tapie là, sourde, frémissante entre les vagues bleues grises.

"Kveikur" qui donne son titre à l’album est ce titre comme un intrus dans la formule éprouvée du groupe.

Ici l’onirisme se confronte à des tonalités presque Noisy, presque Indus. Cette mèche s’enflamme doucement mais sûrement. Ici c’est la dissonance qui s’exprime et vous crache son désespoir à la face dans une fièvre élégante. Ah "Rafstraumur" et sa chute en forme d’élévation orgasmique.

C’est à l’écoute de "Bláþráður" que l’on se rend compte de l’absence du Falsetto de Jonsi sur les autres titres. On est saisi par cette impression que le groupe semble vouloir salir ses lignes mélodiques, les rendre moins envoûtantes, plus frontales.

"Var" fait partie de ces petites splendeurs que Sigur Ros met souvent en clôture de ses albums comme le "All Allright" de "Með suð í eyrum við spilum endalaust" qui a plus à voir avec les travaux de Peter Broderick ou Olafur Arnalds, autre islandais notable qu’à des tonalités industrielles.

 "Kveikur" ne sera pas l’album de la grande révolution promise par le groupe. Ceux qui aiment le groupe continueront à aimer le groupe. Les autres ne trouveront rien de bien neuf sous le soleil de Sigur Ros... sauf dans certains petits détails ou dans le titre "Kveikur" qui surplombe l’album... Nous nous éloignons des onirismes éthérés pour des rêveries du réel cachées derrière ces neufs masques sensoriels.




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