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Lors de son premier EP Nuit Blanche, en 2017, le duo parisien Cérémonie nous avait émus par cette manière d’apprivoiser diverses balises cold-wave pour mieux se dévoiler, et finalement générer une belle identification avec l’auditeur. Sans frime ni revival.

Cérémonie ne s’inspirait pas. Il se plaçait, avec naturel et logique, dans une lignée musicale qui associerait l’intimité des compositions au besoin d’en extraire diverses Play blessures. Un spleen empli de dignité humaine. C’est aussi pourquoi nous hésitions à parler d’influences Joy Division ou The Cure au moment d’écrire sur le duo : Cérémonie composait certes une musique assez cold, mais par nécessité. Ce groupe détenait une virginité salutaire.

Nuit Blanche nous touchait également beaucoup car semblable à une écorce friable. Un univers posait des graines, se cherchait encore un peu mais il semblait évident que Cérémonie allait très vite s’émanciper. Chose faite aujourd’hui avec “Orion”, nouveau single du groupe, son meilleur titre à ce jour. Aux oubliettes, Ian Curtis, les gothiques, Daniel Darc, et ce qui se rattacherait aux années 80. Toujours électro, mais doté d’une souplesse tellement remarquable qu’elle permet à cette composition de virer intemporelle, Cérémonie, à notre sens, s’impose dorénavant comme le plus intriguant des groupes français actuels.

Contacté par mail, Cérémonie nous parle des origines de sa musique : « notre inspiration vient de toutes parts. Évidemment des musiques qu’on écoute, les uns et les autres. On écoute toutes sortes de musiques, des tas. De tous horizons, de tous genres et elles éveillent parfois des envies, provoquent des idées que nous incorporons évidemment, plus ou moins consciemment dans Cérémonie. Mais elle vient aussi des films ou des images que nous regardons, de l’ambiance de la rue, des couleurs de la lumière, de l’humeur de l’époque aussi… C’est assez bête dit comme ça mais s’il est facile d’identifier des inspirations conscientes, il ne faut pas négliger celles auxquelles on croit ne pas faire attention et qui pourtant façonnent notre son ». Confirmation d’une hypothèse : Cérémonie, binôme lynchien, marche au sensoriel.

Groupe à la recherche de zones inédites ? « L a direction vers laquelle on avance bouge. Constamment. Parce qu’il nous faut de la mobilité. À tous. Et en se déplaçant on gagne en assurance, on se révèle graduellement y compris à nous-mêmes. Et cette découverte constante t’empêche de rester immobile. Elle te donne envie de creuser plus encore. Parfois plus loin, ou disons ailleurs ou parfois plus en profondeur. Ce n’est pas tant la recherche d’un inédit absolu qui nous guiderait mais la recherche d’une zone non encore explorée pour nous ». Et en effet : de Nuit Blanche à “Orion”, Cérémonie parait instable, comme si aucune case ne validerait sa musique. Comme si la bougeotte lui autorisait à vite grandir. Ce refus de la mobilité conduit Cérémonie vers les clefs divines d’un horizon promis à tous les espoirs.

Un album en prévision ? Pas encore mais le titre “Orion” sera suivi de deux autres singles et vidéos en mai et juin prochain. Le label qui va signer Cérémonie gagnera le jackpot.