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Enfin traduit en Français (un an après sa sortie) chez Le Mot Et Le Reste, Substance (New Order vu de l’intérieur) reprend l’histoire là où Peter Hook l’avait laissée lors des dernières pages d’Unknown Pleasures : Ian Curtis décédé, quel avenir pour Barney, Peter et les deux autres ? On s’imaginait un bouquin gorgé de came, de cul, de rancunes et de billets verts. On en a un : sur 800 pages, Hooky décrit minutieusement la lente dégénérescence (principalement humaine) de New Order.

Dans un style purement rock’n’roll, mais non sans une touchante lucidité, Peter Hook insiste beaucoup sur son mode de vie destroy avant, pendant et après les concerts de NO. Entre les filles d’un soir, les beuveries cataclysmiques, la coke en pagaille, les premiers ecstasy et les chambres d’hôtel décimées, aucun cliché n’est évité. Sauf que Hooky, implicitement lors de la première partie du livre, n’y ajoute aucun glamour et semble annoncer une chute inéluctable vers la pire des déchéances physiques et morales. Drôle, morbide, un peu triste.

Plus intéressants, mais tout aussi glauques, les passages racontant la confection de chaque album de NO. Guère tendre envers Steven et Gillian (lui, qui fonctionne dans le sens du vent ; elle, qui n’a jamais servi à rien), Hooky, dans une très étrange relation amour / haine, dézingue royalement son comparse Barney (mais on s’y attendait). Frontman par la force des choses, Sumner, de l’innocence Movement jusqu’au monstre Republic, va se transformer en une diva capricieuse, despotique, égocentrique et prête à tout afin de « virer la basse ». Apothéose d’un lent pourrissement relationnel, l’enregistrement de Republic (que Hooky décrit, à raison, comme « un album d’Electronic plutôt que de New Order ») au cours duquel Barney fout à la poubelle les maquettes de ses trois compagnons pour tout reprendre en solo. En même temps, Hook ne cesse d’écrire à quel point Sumner est un grand guitariste et un sacré compositeur. Pas drôle, assez morbide, très triste.

Paradoxe du livre : plus NO devient commercialement gigantesque, plus ses membres font chambre à part. Car pendant que Barney vire au gros connard, que Steven et Gillian deviennent inexistants, Hooky s’enfonce bien profond dans la dope et l’alcoolisme jusqu’au fameux point de non-retour (dépendance physique, désintox). La réussite de chaque album (jusqu’à Technique) s’apparente ainsi à un miracle ! Et relance le principal argument concernant New Order : quatre individus opposés qui, par une étrange et inexplicable alchimie, produisirent l’une des plus belles musiques jamais entendues.

Dans une écriture fluide (même si l’on conseille la version originale), Peter Hook n’épargne personne et surtout pas lui-même : grande gueule alcoolisée, époux martyrisé, petite frappe dopée à la poudre, musicien délaissé (« ce morceau n’a pas besoin de basse » est un leitmotiv que se reçoit continuellement Peter en pleine face – devinez par qui ?)… Absolument pas drôle, souvent morbide, triste pour les fans de NO.

Difficile à dire où se situe ici la part de souvenirs et d’exagérations. Totalement bituré à longueur de pages, Peter y donne sa vision, sa version personnelle de l’histoire. Et avec autant de coke et de vinasse dans le cerveau, il est certes permit de se demander si Hooky n’est pas souvent en proie à des crises de parano ou bien aux descentes du junk. Sauf que la sincérité de l’écriture semble indiquer que rien, hormis ce bouquin forcément anthologique, ne pourra dorénavant saisir la véritable story New Order.




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