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Avant le set, diverses interrogations semblaient légitimes : qu’attendre aujourd’hui d’un concert de Peter Murphy sinon quelques chansons extirpées du répertoire Bauhaus ? Le groupe sur scène, en mode réduit, va-t-il insister sur l’aspect songwriting ou bien peut-on espérer des sursauts cold wave ? En 2016, Peter Murphy possède-t-il une fanbase suffisamment vétuste pour remplir la salle du 3 Clichy ?

Sur ce dernier point, Peter Murphy peut dormir tranquille : bondé jusqu’à l’étouffement, le 3 Clichy accueille ce soir une foule hétéroclite mais totalement dévouée à l’auteur de "Stigmata Martyr". Les gothiques purs et durs côtoient les costards cravates, les cinquantenaires arborent des tee-shirts Bauhaus, les âges se mélangent, une mixité parfaite.

L’ambiance posée, Peter Murphy apparaît : beau, reptilien, d’une discrète élégance naturelle. Le principe du concert, pour Peter, consiste à se faire plaisir en piochant dans quarante années de carrière. Un plaisir qui prend aux tripes dès l’ouverture : cette voix, reconnaissable entre toutes, laisse pantois, admiratif, ensorcelé. Le public a les yeux bien ronds, un sourire aux lèvres – il se passe quelque chose d’extraordinaire, là, devant soi. Bien sûr, quand retentit un classique de Bauhaus (dont, logiquement, "Bela Lugosi’s Dead"), c’est le moment de laisser fuser son enthousiasme ; mais le recueillement reprend très vite ses droits.

Ambiance religieuse : Peter Murphy convainc à chaque titre (des plus connus aux plus obscurs) et oblige à une écoute silencieuse, statique (se diriger vers le bar pour se payer une bière entraîne un considérable effort de persuasion). Une centaine de personnes gravite maintenant dans une bulle. Impossible de temporellement notifier le live. Seule certitude : on en veut encore et encore. D’autant plus que l’épure des compositions rehausse parfaitement le talent d’écriture de Peter, et permet de redécouvrir des chansons hâtivement écoutées sur disque ou bien injustement oubliées.

Le concert s’arrête. Déjà ?! Peter Murphy n’a joué que cinquante minutes ?! On regarde l’heure : heu, non, le musicien a conquis l’auditoire durant 1h30 ! Il s’agissait bien d’une bulle spatio-temporelle.

Photos : Jérôme Sevrette

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