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My favorites horses, ce sont des musiciens chevronnés qui, ensemble depuis 2016, ont trouvé une osmose artistique qui les enchante. Et ça ? ça fait plaisir.

Parce que le plaisir on le ressent à l’écoute de leur nouveau projet composé de 10 titres.

Ils ont fait le choix de chanter (et parfois de parler) en français, sur une musique rock tendue et travaillée dans une atmosphère raffinée où chaque instrument apporte sa pierre (précieuse) à l’édifice. Petit coup de cœur personnel en particulier pour le morceau « Un temps comme celui-ci »

A l’occasion de la sortie de leur album, ADA a posé quelques questions à Manuel PLAZA qu’on retrouve à la basse, aux synthés et sur certains arrangements.

ADA : Les titres de l’album "Miquel" ont été créés dans une période particulière je crois (la pandémie) et en seulement une semaine dans un lieu particulier au cœur des Cévennes (qui a donné son nom à l’album). Cette façon de créer a-t-elle influencé la genèse des 10 morceaux de l’opus ?

Manuel Plaza : L’essentiel de l’album a émergé lors d’un premier séjour hivernal dans les Cévennes, en effet. L’idée était de s’isoler pour moissonner des idées et tester une manière de travailler assez inédite pour nous. On sortait d’une période un peu chaotique (changement de batteur, succession de tournées courtes mais denses, expériences en studio assez contrastées) avec la volonté de resserrer le noyau et de faire le maximum de choses par nous-mêmes, de la manière la plus autonome possible. La pandémie a déboulé dans ces eaux-là, et ce climat très particulier a certainement « contaminé » le prolongement du processus de création. Ce qui est certain, c’est que ces morceaux sont extrêmement liés (« liés » est d’ailleurs le mot qui clôt l’album) au lieu et au temps qui les a vus naître. C’est sans doute un lieu commun, mais nous l’avons expérimenté d’une manière extraordinairement prégnante, sinon tangible. D’où le titre, oui.

ADA : Cet album semble marquer une évolution vers un processus de création plus collectif pour le groupe. Pouvez-vous nous parler de cette nouvelle approche collaborative et comment elle a façonné le son de "Miquel" par rapport à vos précédents morceaux ?

Manuel Plaza : Les deux premiers EP regroupent essentiellement des compos d’Alex (chant, claviers, guitare) qui avaient déjà une forme extrêmement aboutie au moment du passage en studio. Les autres musiciens pouvaient intervenir au niveau des arrangements et contribuaient collectivement au son du groupe, bien sûr, mais l’essentiel était déjà là. Pour Miquel, en revanche, seules quelques esquisses préexistaient sur certains titres. Tout (ou presque) s’est construit in situ, de manière très collaborative, spontanée et détendue. C’était assez nouveau et excitant.

ADA : MY FAVORITE HORSES existe depuis 2016 et a déjà été salué par la critique. Voyez-vous une évolution de votre approche musicale depuis la fondation du groupe jusqu’à la sortie de cet album ?

Manuel Plaza : Saluons gaiement la critique à notre tour ! 8 ans en effet que le groupe existe. 2 EP, 1 album, nous n’avons pas été d’une productivité folle, ce qui peut sembler surprenant a posteriori, quand on sait la quantité de démos qui dorment encore dans nos ordis. Mais on a aussi beaucoup tourné, répété, fait pas mal de résidences. Je pense que nos trois sorties soulignent bien les évolutions du groupe, folk-rock en anglais d’abord, pop-rock plus électronique et en français ensuite… Miquel est incontestablement le produit de cette évolution. Sans doute la forme plus aboutie de musique que nous recherchions. Au regard des attendus de l’époque en termes de son, de production, etc., ce disque peut sembler très imparfait, un peu brut, un peu rugueux, un peu anachronique. C’est là tout son charme, à mon sens.

ADA : En choisissant de chanter des textes en français, MY FAVORITE HORSES contribue à une certaine scène musicale francophone. Comment percevez-vous l’importance de la langue française dans votre travail ?

Manuel Plaza : C’est toujours très étonnant de constater à quel point la perception de la musique peut varier en fonction de la langue employée, à quel point c’est déterminant quand il s’agit de vous « classifier ». Avant, on nous trouvait volontiers des accents de Tindersticks, de Swell, de Bad Seeds, de Radiohead, et depuis le second EP, où le Français s’est imposé, on nous parle plutôt de Bashung, Belin, Kat Onoma, ce genre de choses.

Je crois que nous sommes tous incroyablement formatés, conditionnés, en tant qu’auditeurs. C’est un truc très mystérieux, même si le besoin de repères et de référents est assez compréhensible. Louis Leprince-Ringuet (oui, c’est un pseudo) signe tous les textes, depuis le début, quand MFH n’était encore qu’un projet en duo (lui aux textes, donc, et Alex aux compos).

Que ce soit en Anglais, comme au début, ou en Français, c’est une écriture qui reste en toutes saisons très exigeante, très imagée et dont nous sommes tous absolument admiratifs.

Mais ce choix linguistique ne découle d’aucun calcul, il s’est imposé très naturellement, on n’y pense même plus, si ce n’est en tant que motif supplémentaire de fierté collective.

Nous sommes relativement fans les uns des autres !

Crédit photo @Richard Bellia

ADA : Le son de MY FAVORITE HORSES est souvent caractérisé par une élégance mélodique et des tensions harmoniques. Avez-vous consciemment intégré cet esprit plus léger et groovy, teinté de dérision voire d’absurde dans ce projet "Miquel" ou cela s’est-il imposé à vous ?

Manuel Plaza : L’élégance, les tensions, ce sont des appréciations journalistiques qui nous honorent.

Pour le reste, je suis obligé d’assumer la responsabilité d’« éléments de langage » tels que « groovy », « dérision » et « absurde ». Le trait est sans doute un peu forcé (on n’a pas encore versé dans le funk torride, le ska festif ou le dadaïsme, tant s’en faut) mais il fallait bien marquer cette inflexion qui s’est imposée très naturellement pendant tout le processus, cette sorte de relâchement.

Sur les enregistrements précédents, tout était hyper maîtrisé, soigné, un peu froid, à la limite. Là, même si paradoxalement, on n’a jamais bossé autant que sur ce projet (le mixage en particulier a été assez long) on s’est un peu « lâché la bride », pour filer la métaphore équestre.

ADA : Ayant une grande expérience de la scène avec plus de 80 dates à votre actif, comment imaginez-vous ces nouvelles chansons adaptées à un contexte live ? Y’ a-t-il des morceaux que vous avez particulièrement hâte de jouer avec la dynamique d’un concert ?

Manuel Plaza : Le fait est que certains morceaux de l’album ont déjà été joués sur scène, quand la crise sanitaire s’est éloignée. Mais on n’a pas fait suffisamment de concerts depuis pour que ces morceaux risquent l’usure. Ils conservent à nos oreilles toute leur fraîcheur.

Par exemple « La rivière en été », qui ouvre assez systématiquement chaque répétition, agit toujours comme un vrai booster, un pur shoot d’adrénaline. C’est plutôt rare (et limite incongru) d’avoir des frissons en jouant sa propre musique, mais là, ça perdure étonnamment. On prend ça comme un signe positif, un indicateur de désir, si on veut.

ADA : Et pour finir, quelle est la question qu’on ne vous a jamais posé en interview et que vous aimeriez qu’on vous pose ?

Manuel Plaza : « Mais alors, finalement, pourquoi ? »

ADA : Et maintenant la réponse à cette fameuse question !?

Manuel Plaza : « Aucune idée. »



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