Nous attentons avec fébrilité les œuvres post pandémie, mais nous pouvons déjà nous délecter, car c’est le cas ici, des œuvres post Trump. Cette Amérique qui ne fait plus rêver que les nostalgiques du super size me, a depuis quelques années une gueule de bois monstrueuse, ayant fait de son american way of live, la première pierre de son édifice mortuaire. Dans ce fracas sourd, les braillards semblaient être les seuls jusqu’à présent à faire entendre une voix qui trouvait son carburant dans les pires immondices d’une Amérique blanche et réfractaire à admettre que son histoire n’était pas aussi sclérosée qu’ils voulaient bien le croire. Dans cette ambiance à la lisière de la fin d’un rêve consumériste, mais sans partage, Kyle Morton alias Typhoon a prit sa guitare, sa voix si proche de celle de son glorieux compatriote Will Oldham et a échafaudé un constat sans concession sans jamais donner une once de place à la noirceur. Le disque se veut tout aussi poignant et mélancolique que lumineux dans ses arrangements. L’Amérique y est sanctifiée, sa musique ici fil conducteur d’une œuvre qui est ancrée dans cette terre de l’espoir. Comme a pu le faire Calexico par le passé, Typhoon ne s’absout pas du passé, mais le ravive avec une modernité qui ne se trouve pas dans une numérisation à outrance (Empire Builder). Certes, l’air est manquant, mais Typhoon n’a pas le souffle court pour chanter son désespoir, il tord le cou à la peste brune qui recouvre les grandes plaines de l’espérance passée, la repoussant via des hymnes possibles et émouvantes (We’re In It). C’est un grand disque sur les petites histoires, une tentative de coloration d’un passé proche qui aura fait tomber l’Amérique sous un ciel noir. Une flamme terrassante de beauté et d’espoir. Magnifique.