Quel est le point commun entre ce disque et Pierre Bayle, Christian Wolff ou Arthur Lovejoy. Qu’est ce qui touche à ces trois illustres philosophes et aux deux musiciens fondateurs du duo Chaos Shrine. Qu’est-ce qui fait que Paul Beuchamp et Andrea Cauduro, se retrouve comme liés par une chose. La dualité. La dualité, qui n’est pas une équipe de double mixte dans l’esprit de Franck Ribery, mais l’un des principes fondateurs de la magie du chaos. La dualité est le principe central de ce disque, dialogue sans mot, pas plus pendant la conception que pendant la retranscription, les deux musiciens attendant la fusion de leurs idées respectives pour acquiescer de la pérennité de celles-ci dans une union loin du chaos des échanges, des frictions.

D’un côté, il y a Paul Beauchamp. Élevé dans une ferme de Caroline du Nord, il commença des recherches sonores de façon empirique, jouant avec les bandes avant de devenir ingénieur de studio professionnel et de poursuivre son travail de musicien solo d’ambiance/drone en se concentrant sur la musique de recherche et l’utilisation d’instruments traditionnels et non traditionnels. Beauchamp a collaboré entre autres avec Fabrizio Modonese Palumbo (Larsen), Julia Kent (Rasputina, Anthony and the Johnsons), Jochen Arbeit (Automat, Einsturzende Neubauten), Lydia Lunch, Ben Chasny (Six Organs of Admittance), Paolo Spaccamonti, Johann Johannsson, Colin Potter et Steve Stapleton (Nurse With Wound).

De l’autre, ou plutôt en face, André Cauduro, musicien et compositeur qui obtiendra un master avec une thèse sur les œuvres pour guitare de John Zorn. Il travaillera dans divers festivals Sonology Showlab (Den Haag), Noiseberg (Berlin) et Sirga Festival di FIix (Barcelone) dans le cadre d’un ensemble dirigé par Mats Gustafsson, creusant ses recherches et sa pratique dans la musique contemporaine. En solo, tel un indiana Jones musicologue, il est à la recherche et à la découverte de la forme la plus ancienne de la guitare, s’en servant avec des boucles, des drones pour amener jusqu’à nous des musiques rituelles anciennes.

De cet alliage, découle un disque plein de mystère, mais d’un accès facile, l’auditeur étant au cœur de ce projet, ne voyant pas en lui le simple spectateur, mais plutôt le récepteur de quelque chose qui pourrait rebondir et se propager. La pierre sonore et peut-être philosophale pour comprendre une partie du chaos. Passionnant