Quand Billie Eillish sortait, en 2021, un de ses albums « chuchotés », Shannon Wright avait déjà une carrière confidentielle - hélas ! - de plus de trente ans derrière elle. Sincérité oblige, exit les majors, l’artiste signe depuis 2020 sur Vicious Circle. Après plusieurs fructueuses collaborations avec le regretté Philippe Couderc et Yann Tiersen, ou encore Katia Labèque - entre autres chouchous hexagonaux - Shannon a dû essuyer pas mal de coups durs, perdu des amis proches et quelques idéaux mais pas au point de tarir son puits d’amour… En tout cas elle a de la ressource du côté du coeur.
Rarement éloigné d’un son grunge cher à notre californienne d’adoption, c’est un objet mélancolique dans lequel s’immisce parfois un soupçon de Portishead. Il s’intitule Reservoir of Love. C’est son dernier album. Le piano, dont elle joue et que l’on peut entendre sur « Mountains » sixième titre, frôle les fantômes familiers de Blonde Redhead… PJ Harvey - époque Is This Desire - ne démentirait pas non plus « Ballad Of A Heist ». On émerge de ce réservoir d’amour plutôt convaincu que l’album de Shannon Wright est nourri à la même source que de plus célèbres rockers : celle de la distorsion, d’une plume efficace, d’un coeur qui saigne mais ne se dessèche point malgré les tempêtes que l’existence lui inflige. Et chaque hiver qui s’ajoute aux précédents abreuve davantage cette artiste à l’apparente fragilité, celle qui s’arc-boute à la vie sans jamais oublier de la traverser en musique.