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Jusqu’à ce que je sorte avec une fille addict de Modern Vampires of the City, troisième album du trio mené par le sautillant / névrosé Ezra Koenig, paru en 2013 et dont l’écoute contrainte – que ce soit un soir au Zénith où elle m’invita malgré moi ou durant les traditionnelles disputes en voiture pendant lesquelles je me voyais broyé par ses reproches inaltérables tout autant que les chansons tièdes de son nouveau groupe fétiche (un peu plus tard, ce fut Herman Düne, Julien Doré et Christine and the Queens – mon goût en matière de femmes qui ont mauvais goût me laissera toujours perplexe), je n’avais prêté qu’une oreille polie et peu attentive aux œuvres de Vampire Weekend, bien moins tranchantes que leurs compères de l’époque,  !!! et autres LCD Soundsystem.

Efficace et fade, tel était mon juvénile verdict. Alors pourquoi se taper Only God Was Above Us, le cinquième opus de Vampire Weekend ? La nostalgie des embrouilles, peut-être, ou alors le souvenir des gimmicks irrésistibles dont est capable le groupe, allez savoir, il y a que je suis las d’avoir d’excellentes préférences culturelles et que parfois la putasserie mainstream m’apaise, pour me rappeler qu’à juste titre Daydream Nation est le meilleur album du monde.

Alors en route mes amis, en route pour les habiles singeries d’Ezra et ses amis, agrippés aux branches d’un arbre pop commercialement mort depuis des années, scié par les bûcherons hip hop, toutes harmonies à deux accords et sonorités commerciales à l’appui, adieu les touches noires du clavier et les quintes et les septièmes et les harmonies. Drake, you’re the good one, the fossoyeur, the only one, mais pas que, milliards de débiles qui kiffent les « sons ».

Et donc, dans cette modernité aux bras inutiles, Vampire Weekend pourrait faire office de garant d’une certaine forme d’artisanat : bah, dès l’inaugural et enlevé Ice Cream Piano on est transporté, ballade qui vire au chaos jouissif, pop et mélodique, irrésistible, trois climats en un, impossible de résister. Dix titres durant on retrouve les marqueurs weekendiens, mélodies mémorables, chant ligne claire et sincère, arrangements malins, brouillés et incisifs, à tel point que l’écoute de Only God Was Above Us devient un jeu de piste : des cuivres crevés et des guitares à la The Byrds (Classical), un slow folk aux ponctuations vrillantes (Capricorn), un piano virtuose qui sait se taire au profit d’une sorte de jungle jazzy (Connect), aucune frime ou effets superfétatoires, tout est simple, limpide, étonnant, mais il manque un truc : la chanson qui tue. Certes, The Surfer groove en mode high school, l’intro de Gen-X Cops déchire, Mary Boone se la joue gospel trafiqué, mais pourquoi placer la meilleure song à la fin ? Hope et ses presque huit minutes, miniatures pianistiques et bridge ample, porté par les cuivres et les synthétiseurs, une belle conclusion.

Si Only God Was Above Us est moins pop que ses prédécesseurs, il n’en reste pas moins abouti et me rend nostalgique des engueulades en voiture, bien qu’à l’époque j’eusse voulu tuer tout autant la dispute que les membres de Vampire Weekend. Eux au moins auront survécu, au contraire du couple que je formais avec cette bien irascible conductrice. Well done.




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