Et bah voilà ! Ça devait arriver… A vouloir thésauriser sur une valeur si peu économiquement domesticable, les Jean-Pierre Gaillard petits-bras qui prennent ebay pour un Wall Street en chaussons se retrouvent fort maris. Eux qui spéculaient sur la valeur des Eps non encore recommercialisés de James Rutledge aka Pedro, prennent désormais pleine conscience que le mot " risk " n’a pas été accolé inutilement à " capital " dans l’expression ainsi composée. L’une des deux têtes pensantes de l’impeccable label Melodic décide en effet de placer dans la lumière le fruit du travail abattu ces sept dernières années et le réunit sur ce Lp au titre explicite de Early Pedro. Il y offre une fouille minutieuse de son archéologie musicale et en présente quasi scientifiquement le résultat. La première strate des enregistrements de Pedro, l’Ep intitulé Repent, laisse affleurer après travail sur la matière, des minéraux d’electronica gracile (" Assebled By " ou encore " Repent " justement) parfois gentiment bousculés par quelques beats trublions (" Lay Down Mega Man ", " Field Angels "). Six titres qui suffiraient à combler pour l’éternité tout aspirant bidouilleur désireux de coucher sur bandes ses rêves de gloire.
La strate suivante permet de dégager les vestiges de ce que l’on nomme aujourd’hui par commodité, folktronica. Piano, touches de glockenspiel éparses, guitares acoustiques, voire cordes y copulent joyeusement sur une base électronique finaude. Le tout selon un mode downtempo du meilleur aloi. " Chapel Was My Dream " ou le magistral " The Right Way To Play Chess " et ses faux-airs bossa constituent par exemple autant de découvertes de platine. Ce Chapel Was My Dream Ep n’en délaisse pas pour autant les amours downbeat de Rutledge (" Koolhass " en l’espèce cool as son camarade de label le nouvellement nommé L. Pierre, ou bien " D.A.R.R.Y.L. "). Un Ep d’une rare tenue qui vous interdira tout contact avec le réel pendant de longues et léthargiques minutes. Classe. Cette collection se voit complétée par la dernière couche de la roche sédimentaire Pedro datée de décembre 2002. L’auditeur pénètre ici dans l’ère Kathryn Williams dont la voix magnifie, s’il était possible, des compositions electro-accoustiques toujours aussi légères et agréablement caressantes. La féminité en plus. Classe, deux fois.
La fin de ces fouilles jubilatoires confirment l’auditeur dans sa certitude d’avoir arraché à la terre un chef-d’œuvre qui rejoindra bientôt ceux de ses paires méticuleusement alignés dans le musée de nos émotions sonores. Malgré le Lp de remix sorti cet hiver (Fear & Resilience), on sent pourtant déjà que l’attente du deuxième effort de Pedro, imminent, sera longue comme un jour sans Marie Drucker… .