Voici un exemplaire specimen de chansons sans frontières.

Un vieil adage suppose grosso modo qu’il n’existerait que deux genres de musique : la bonne et la perrave. Toute autre acception (tendance, after-mode, protostyle, vieilles scies ou nouvelles vagues) n’étant que mauvaises limonades et sales critiques aquatiques. Cette allusion tout à fait péremptoire et sommaire il faut l’avouer, se justifie pourtant ici doublement : d’une part parce que la musique constituant cette Sangria est vraiment bonne, et même carrément canon ; d’autre part parce que les membres de ce duo de choc - Jur Domingo et Julien Vittecoq couple sur disque et à la ville - sont de bouillonnants artistes tout à fait spéciaux.

Il se joue en effet quelque chose d’original au coeur de ce projet, un quelque chose qui n’est pas vraiment de la chanson mais pas exactement trop loin non plus. Cela oscille constamment entre l’organique et le plus électronique, entre la senualité des voix et la quête de vérité brut de décoffrage, le lâcher prise et la colère rentrée, la joie exaltée aussi. Un quelque chose à la poursuite duquel les deux membres de ce remuant cénacle (on y croisera aussi avec plaisir le mirifique Bernando Sandoval) se lancent comme une seule femme.

Clairement, ils font feu de tout bois. Les idées farfelues d’arrangements, les rythmiques chancelantes se percutent à une poésie crue et sincère, portée par deux voix directes, forcées par la vie, forgées à même cette dernière. Au final, s’offrent à nous onze morceaux différents, onze instantanés de leur captivante conquête du bonheur. Et pour sûr, ça n’a pas dû être de tout repos. C’est le moins qu’on puisse en dire !

Alors comment ne pas louer l’art et la manière avec lesquels ces instants chavirés et chavirant se confondent en une mixture aussi vivante que belle. Cette Sangria a décidément un goût dingue. La recette de Jur est magique. Vivante et belle qu’on vous dit !