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Le nouvel EP d’Helluvah se termine par une chanson nommée Early Days. Un titre que n’auraient pas renié les Pastels : fulgurance indie-pop aux saveurs dorénavant éternelles (l’une des meilleures chansons de 2018, incontestablement), Early Days, comme chez Morrissey ou donc Stephen McRobbie, transforme le spleen individuel en leçon de vie, en une morale pour ne pas condamner l’époque. Dansons sous les bombes, faisons mine de croire encore un peu à la fête, à l’alcool, aux substances illicites – que nous reste-t-il ?

Echo Valley s’avance ainsi sur la pointe des pieds. Camille Warmé y célèbre la dance (entre Depeche Mode et Essaie Pas, pour aller vite), elle se force tellement à y croire que certains titres de cet EP pourraient aisément rendre hystérique le clubber en plein after. Il ne s’agit pourtant guère, chez Camille, d’adjoindre du spleen à des morceaux dansants, mais de chercher à tirer la mélancolie, avec violence, vers une certaine forme d’acceptation, parfois même de résignation distanciée.

Hors de question, chez Helluvah, de se répandre en morosité, en constats nihilistes. Le cœur se fissure mais il faut danser, encore et encore. Le premier morceau s’intitule La Fête (tube !), et l’auditeur est en accord avec Camille lorsqu’elle affirme, sur une rythmique diabolique, « à quoi tu penses ? Tout est fini ». C’est dans un entre-deux que se situe Echo Valley : pas spécialement la gueule de bois mais ce moment où l’on se demande ce qui adviendra après l’euphorie actuelle, cette joie durant laquelle l’éthylisme ne peut perturber la conscience du festif malgré lui. Quand les sentiments amoureux pourraient ne pas survivre au lendemain, aussi.

Echo Valley est un grand disque de l’instant présent. Plutôt rare en France, cette facilité à saisir un descriptif, à ne lui adjoindre ni passé ni futur, mais à faire comprendre que l’hédonisme vécu n’est qu’usurpation, protection salutaire pour faire bonne mine. L’honnêteté d’une grande musicienne…