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Domino est l’archétype de la bonhommie. D’une humeur toujours égale, bienveillant, je passe parfois le voir dans son échoppe (il travaille chez Disc Over, antique disquaire messin) et dernièrement il me file son troisième ep "Songs for Glasgow". J’avais déjà les deux précédents que j’avais bien aimés, sa musique ayant une personnalité originale et pas aisée à cerner. Comme tout disquaire, il est traversé par trop d’amours et ne connaît aucune stabilité émotionnelle en musique (on parle autant de Nicole Atkins que de Spiritual Beggars quand on se voit). Sa musique, si on pouvait lui trouver auparavant une affiliation à une forme de stoner, a surtout cultivé le métissage comme meilleur moyen d’éviter la consanguinité (si vous avez des doutes regardez "Deliverance"). Et c’est peut être la non affiliation à un mouvement qui fait de Domino & The Ghosts un projet aussi étrange que son nom. Je ne m’amuserais pas à lui trouver un genre, ça finirait en liste de tags, mais chaque morceau développe une vision.

Ce que sa musique a perdu en violence au cours des trois eps, elle l’a gagné en tension. L’acoustique s’impose sur une majorité de Songs For Glasgow, la tension vocale s’installe, et parfois on a l’impression d’être au bord d’un feu accompagnés de Trent Reznor, Misery Loves Co, Thurston Moore qui nous feraient un unplugged psychiatrique, tout ça sous l’œil malveillant de fantômes tels que Kurt Cobain ("Dance with me" oblige l’invocation) ou Layne Stayley. Calme mais pas tranquille. L’insécurité se fait sentir sur cet ep qui touche la trentaine de minutes tout de même. Une demi heure durant laquelle vous vous poserez des questions sur votre santé mentale. "Nelly Glasgow" témoigne de l’atmosphère instable, avec des vocalises comme autant de cris échappés du dortoir d’un asile, une batterie quasi tribale. Le tout sonne comme une forme de mysticisme sous benzodiazépine. "Lovers" sent bon le Monochrome de l’album "Laser", dans le son et l’attaque. Mais encore une fois sous une optique maladive. Avec ce morceau il décroche un riff monstrueux, tout comme son suivant "Delicate", sa façon à lui d’être doux en restant inquiétant, cas unique de démence kawaii. En six morceaux Domino nous raconte une histoire qui se clôture en apogée sur "Song to celebrate", notamment grâce aux vocalises de Béra, au violoncelle qui se joint à la danse courant sur une transe étrange de près de dix minutes. Produit par Baptiste Bouchard (My Own Private Alaska, Cats On Trees...) Songs For Glasgow clôture une trilogie, étend l’univers de Domino & The Ghosts en visitant une nouvelle constellation. Cette clef de voûte donne rétrospectivement plus de sens aux deux précédents opus. Il paraît qu’un album arrive. Je n’ose même pas imaginer les folles perspectives qu’il nous prépare.




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