> Critiques > Autoproduits



Difficile, voire impossible pour moi de chroniquer un disque qui semble défier les lois même de la structure d’un disque, que l’on nommerait « traditionnel ». Comme il se présente lui même, Emmanuel Mailly est un faiseur de son, un musicien qui ne compose pas, pas plus d’ailleurs qu’il ne décompose. Il laisse l’inspiration (la respiration) s’imposer sans qu’une grille, qu’une grammaire quelconque viennent bousculer un geste, un souffle. Adepte de la guitare préparée, souvent couplé à une présence scénique qu’elle soit graphique ou corporelle, Emmanuel Mailly aime l’accident quand celui ci releve d’un art brut plutôt que d’un art appliqué, retournant presque à la naissance, à la jeunesse de la musique dans sa signification la plus littérale. Avec cet album Emmanuel Mailly retourne à certains de ses premiers amours, et principalement la guitare quand celle ci lorgne vers les expérimentations soniques, quand elle grince, créant une atmosphère tout à la fois ouverte et oppressante (mais que ce passera il l’instant d’après ?). Si la répétition est le seul gage de continuité, le seul fil qui nous permet de rester dans un morceau, le lieu même de l’écoute à son importance. L’écoute doit s’accompagner d’une source visuelle, d’un mouvement, elle ne pourra sans cela combler une oreille habituée au confort d’un morceau à la géométrie commune. Voilà alors certes le titre est intimident, la musique encore plus car elle peut faire appelle à des références qui échappent à notre Who’s Who personnel, mais assez directement elle sait dompter notre attention, préservant en elle quelque chose d’assez impalpable et difficilement explicable qui touche presque à l’universalité. Emmanuel Mailly, sculpteur sonore, dompteur sonore, magicien sonore.