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On l’avait écouté avec attention il y a tout juste deux ans avec Let’s Look Back, le voici qui revient avec cet album intense et toujours autant marqué par la patte Elliott Smith qu’on lui prête (qu’y faire ? Ce sont la voix, le rythme, ce sont les sujets, c’est la géographie… Bref.). Caleb Nichols possède la force, la poigne, et quelques dizaines de lectures de poésie derrière lui, y a matière à causer. Identité, désir, souvenir ; les thèmes évoqués par les compositions poignantes de celui qui fut un temps bassiste de Grand Lake et de Port O’Brien on les connaît, on ne s’en lasse pas. Aussi peu que les dizaines d’albums à venir (on sent l’artiste très productif) les romans et les recueils imprégnés des Beatles (notre Nichols californien s’avère être un grand fan de Lennon) ne cherche ni la popularité, ni solo, folk, calme, cet album est le fruit de deux ans de tournées et de lectures, suite aux publications des écrits de Caleb Nichols. À prendre sérieusement, diantre ! Il est sur scène tout le temps…

À noter également sur ce « retour à l’âge de pierre », des influences Ted Leo & RX qui mettent du baume au vague à l’âme et des onguents sur l’âge de pierre qui est, à n’en point douter, notre cinquantaine à nous bien tassée, ainsi que l’état de délitement absurdement tragique auquel nous assistons. Un âge de pierre qui se situerait, non pas dans la première des trois périodes de la Préhistoire (selon le système inventé par Christian Jürgensen Thomsen en 1836). Notre âge de pierre contemporain ne sera probablement ni suivi de l’âge du Bronze ni de l’âge du Fer.

Caractérisé par l’usage d’outils lithiques, il était à l’origine subdivisé en Paléolithique (âge de la Pierre taillée), Mésolithique et Néolithique (âge de la Pierre polie). Non pas que nous nous rappelions nos cours d’Histoire du collège, mais il est devenu tellement tentant de nous jeter sur un site internet tel que celui d’un dictionnaire multimédia en ligne (celui de la Suisse ou DHS en l’occurence) que ce serait un vrai gâchis que de devoir appeler la désormais grabataire Madame Dubois qui tentait péniblement de nous faire adorer Justinien et je ne sais quelle frise bidon (à apprendre par coeur en classe de cinquième : les programmes ont-ils changé ? Et d’ailleurs, a-t-on mis la main sur les escrocs qui rédigent les manuels d’Histoire ? Toujours pas ? Mais que fait le Ministère ?).

Et sinon, ah, oui, Caleb Nichols ! « L’évolution de l’homme est assez souvent comparée visuellement à un buisson : plus on s’éloigne dans le temps, plus le nombre d’individus diminue (les fossiles anciens sont plus rares et difficiles à trouver). Plusieurs espèces d’hommes ont existé, parfois simultanément, sans qu’on puisse établir une filiation claire de l’une à l’autre. » Tu m’étonnes ! « Certaines ont disparus sans laisser de descendants, d’autres ont fourni des populations qui ont évolué de façon autonome et acquis des particularités telles qu’elles ont été rangées dans une nouvelle espèce. Le problème principal qui se pose au paléoanthropologue concerne la définition même de l’espèce qui repose, pour les êtres actuels, sur le critère d’interfécondité. Comment savoir si deux population ont pu se rencontrer, si elles ont pu se reproduire et donner naissance à des individus eux-mêmes féconds ? La question s’est posée pour Homo sapiens et Homo neanderthalensis. »

La définition même de l’espèce. Certes, ces mots ne sont pas de notre Caleb Nichols californien mais de l’Université de Picardie qui nous régale ici d’un érudit paragraphe. L’ autre Âge de Pierre était glorieux, alors pourquoi donc pas le nôtre ? Avec le dernier Caleb Nichols - que vous pouvez écouter et ré-écouter - vous vous ne blessez pas, moins en tout cas que sur les débats sans fin auxquels les media dits d’information nous frottent au quotidien.