13 octobre 2025 / Le nouvel opus du Fresh Prince of Bel-Air se classe dans la rubrique christian hip-hop, et alors ? Sauf à rappeler les innombrables / paradoxales références religieuses de nos hexagonaux rappeurs bigots, fins moralistes hypocrites et contempteurs d’un monde qu’ils observent depuis leurs villas floridiennes ou quatariennes, concentrons-nous sur les puritaines States, habituées aux bénis-oui-oui ascendant gettho en toc (MC 900 Ft. Jesus, Kanye West et autres Ice Cube). Les flingues, les putes, la thune : au bout du chemin, le regret, l’auto-pardon, la rédemption, ce genre de narratif neu-neu dont Will Smith – une fois passée la tempête médiatique engendrée par l’approximatif bourre-pif qu’il a collé en direct à la télévision à son ancien-pote-pseudo-humoriste-jamais-drôle Chris Rock, qui avait manqué de respect à son épouse, el famoso Jada Pinkett Smith – fait aujourd’hui son miel, sachant que par ailleurs il s’était dilué entre scientologie et (beaucoup de) mauvais films, dont le plus symptomatique n’est pas l’atroce After Earth mais bien ce foutu I Am A Legend, qui ruinait une fois encore le génial roman de Richard Matheson et dont malheureusement une suite semble être au programme, avec un Willy Will ressuscité, non, pitié, non ! Faisant fi de ses nombreux déboires, l’irrésistible Williard Carroll Smith Jr (franchement, qui n’aime pas cette bouille expressive aux oreilles décollées ?) nous sort, la soixantaine approchante, un album de hip-hop vintage massacré par la critique mais dont le charme indéniable nous ramène direct au début des nineties – paroles égrillardes (Int. Barbershop – Day1), sonorités gangsta roots (You Lookin’ For Me ?), groove organique (The Reverend - Rave Sermon), le timbre de voix creusé par le temps, la grosse voix de daron, incantations flamboyantes, gospel intranquille, horrorcore (Rave In The Wasteland), toute analogie hasardeuse, l’on pense à la carrière tardive de Johnny Cash, quand sueur, sang et regrets assumés prenaient le pas sur les certitudes. Fabuleux Bulletproof (feat. Jac Ross), lourd d’un groove poisseux et putassier – on est face à des vieux mecs qui maîtrisent le hip-hop, mais aussi le swamp et le blues, les Black Keys tournent depuis des années autour d’un tel morceau. Pour l’anecdote, sur les sites agrégateurs de critiques musicales, Based on a True Story figure en dernière position. Poubelle le délicieux Hard Times (Smile) et le chant soul suave 00s de Teyana Taylor ? Poubelle l’ondoyant auto-tuné Beautiful Scars ? Mood californien, smells like weed. Poubelle le minimaliste Tantrum, pincée dub-hop planant, sci-fi speed, flow dans le rouge ? Et la guitare flamenco de First Love, le chant latino d’India Martínez, Will clairement tape sur l’épaule de Bad Bunny : « Hey mec, remember qui est le prince de l’air, du bel air » : j’envoie un tube auto-tuné un peu débile, base latino, Make It Look Easy, ça marche carrément, pas pire qu’un mojito trafiqué, ou un sourire de travers ou une merde de Manu Chao. A l’écoute de You Can Make It, chorale groove enthousiasmante qui donne envie de claquer des mains, l’on se rend compte à quel point Will Smith en a bavé. Dans la musique, peut-être son dernier sanctuaire, il se lâche, il se retrouve. Timbre de voix abîmé, doutes, monologues, le mec balance, faisant de Based on a True Story un testament bravache plutôt cool.