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On y va, on est prêts, on attaque comme si de rien n’était notre 3e et dernier jour de Rockos, avec une détermination et une décontraction sans faille. Merde quoi, si en plus il fallait être stressé…

Tiens, les programmateurs de passage sont mis à contribution : on avait déjà vu DJ Kemical Kem notamment programmateur des Eurockéennes… l’an dernier. Cette année, ce sont Alex Stevens du Dour Festival et Yann Rivoal de la Vapeur et du festival Génériq qui s’y collent en nous abreuvant les oreilles de bon son au Central bar à l’heure de l’apéro (ou du digeo, ça dépend de ta capacité de récupération). On reconnaît au passage du Rivulets, du Beak>, parfaits pour remettre le facteur sur le vélo.

Après la bière, direction la Chapelle Saint Jacques pour une ambiance plus feutrée, comme un cocon pour accueillir la suisse Kety Fusco, qui remplace Phantoms initialement prévu. Pour l’anecdote, nous l’avions vu l’année passée dans ce même lieu au sein de l’excellent Wicked Orchestra accompagnant Peter Kernel. Elle joue de sa harpe électrique debout, la portant avec une sangle/ceinture : c’est visuellement très beau, cette femme-harpe qui se détache dans les lumières du plateau, faisant des gestes amples. Kety crée des ambiances féériques, tout en douceur, avec boucles de harpes, quelques samples rythmiques, et des passages au clavier. Elle alterne le jeu debout et le jeu posé, la harpe alors sur un support, nous faisant parfois sortir de la rêverie par ses nombreuses manipulations techniques.

Ça devait être l’année de jumelage Suisse avec Vendôme, puisque le groupe suivant est aussi helvète : Egopusher, duo batterie-violon, mais bien plus que ça en fait. Le concert débute par de l’électro pure, arpège au clavier analogique / rythmique répétitive pour une musique trippante, qui t’englobe. Les mélodies de violons prennent place et quand le beat électro atteint son apogée, la batterie entre en scène et apporte une puissance organique. Dès le 1er morceau, et tout au long du set, leur musique nous fait atteindre des sommets. Scotchés nous sommes par les textures sonores et les questions-réponses batterie-violon.

À 18h, La fabrique du Docteur Faton, lieu créé par "le molosse masqué en kilt et torse-nu" (comme décrit dans notre report de l’an dernier) de Rebeka Warrior, est noire de monde pour accueillir le quatuor régional Yacht Club et un concert filmé par What Comes Around Goes Around (https://youtu.be/e1x_Z75CXGo). Sans présager d’un style à lui, on pourrait situer ce groupe entre le foutraque joyeux de Gablé et la musique déstructurée de Deerhoof, également appuyé par le chant asiatique et féminin commun aux 2. Les 4 musiciens (batterie, 2 guitares et un clavier Yamaha cheap des 80s) s’amusent à mélanger des mélodies enfantines et entêtantes à des structures non conventionnelles, le tout dans une énergie communicative !

Vite vite, nous nous rendons au Minotaure pour débuter la soirée avec les juvéniles espagnoles de Mourn, sur la petite scène du bar. Découvertes il y a un peu via plusieurs vidéos live assez bluffantes, il nous tardait de les voir en vrai. Toutes de blanc vêtues, les 3 guitaristes / bassiste et le batteur n’ont pas attendu l’âge de 20 ans pour avoir digéré le post-hardcore US des 90s. Énergique, en place, il manque encore un peu de maturité pour que la personnalité du groupe se révèle complètement. Bon concert en tout cas. À suivre de près.

On profite d’un changement de plateau pour aller se sustenter. Comme chaque année, les repas sont préparés avec des produits locaux, pour des propositions équilibrées et aussi végétariennes. On remarque cependant une petite baisse de qualité dans la préparation, notamment côté desserts, moins diversifiés et yummy que d’habitude, certains plats moins réussis (falafels très secs, par exemple). Comme on était habitué à une top qualité pour ce festival, on devient exigeant, hein. Mais ça reste largement au-dessus de beaucoup de food-trucks…

And now, l’événement déjà annoncé précédemment dans nos colonnes : la rencontre BRNS et Ropoporose (ou RPPRS pour les intimes), nouveau projet monté ces derniers mois, avec des compos spécifiques. La disposition atypique d’un plateau placé au centre de la salle n’est pas sans nous rappeler l’expérience La Colonie de Vacances. Ici, le public est tout autour du groupe ainsi formé (tiens, sans la clavier de BRNS ?), dont tous les membres se font face. La musique ? C’est forcément un bon compromis entre le meilleur des 2 groupes, avec les mélodies addictives de RPPRS alliées à la puissance de frappe de BRNS.

Amplis guitares et basse alignés sur la grande scène, pas de doute, c’est LANE (Love and Noise Experiment) qui enchaine ensuite. On retrouve avec une émotion non feinte 2 anciens Thugs (+ un des fistons qui reprend le flambeau familial) avec 2 Daria, pour une musique à base de mur de guitares, entre punk-rock expéditif et pop-noise : musique directe qui fait se regrouper devant la scène un public de quarantenaires ravis de retrouver une telle énergie rock. Nous aussi, il faut avouer.

Nouveau jeune prodige de la scène rap canadienne, Zach Zoya, accompagné d’un autre MC et d’un comparse aux platines défend sa ligne. Du peu qu’on en a vu, son hip-hop moderne et accrocheur a remporté l’adhésion du public présent.

La délicieuse Jeanne Added embellit de concert en concert, son personnage magnifié par les lumières blanches. Le public, subjugué de retrouver celle qu’on entend sur toutes les ondes, connaît par cœur ses tubes, chantant en osmose avec elle et hurlant devant ses moindres pas de danse (on ne comprend pas toujours pourquoi). Ne vous y trompez pas, une star est née ! Nous retrouvons avec plaisir plusieurs titres de son 1er album "Be sensational", avec un "A war is coming" rougeoyant et un "Look at them" au chant maitrisé à la perfection, as usually. Elle déroule évidemment une bonne partie de son nouvel album "Radiate", dont on reconnaît le single "Mutate", à l’électro-dansant d’une belle efficacité.

Retour dans le hall du bar, où hormis la débauche de claviers analogiques sur la petite scène devant accueillir Arnaud Rebotini, s’installent en plein milieu 3 musiciens… des amplis guitares, une batterie, un ampli basse à même le sol. Qu’est-ce donc que ce happening ? Le temps de comprendre, on se prend une bonne déferlante de guitare hurlante, de batterie sauvage et de basse rouleau-compresseur. Yonatan Gat manie sa SG double manche (6 + 12 cordes) comme s’il s’agissait d’un jouet, la triturant à l’envi, sortant des riffs croisant la surf music, le psyché et une bonne dose de rock’n’roll. La proximité du public rend la chose d’autant plus jouissive.

Une fois le dancefloor débarrassé des instruments de Yonatan Gat, c’est donc le fameux Arnaud Rebotini qui prend la relève pour clore cette soirée et le festival. Entouré de tous ses instruments (claviers, boîtes à rythmes, consoles), il n’a pas son pareil pour mettre le feu avec sa dance 100 % analogique : c’est beau c’est chaud c’est troublant, ça envoie avec du style et de la prestance, de l’electro en costard et cheveux gominés ! Il n’arrête pas, tournant sur lui-même à la recherche du prochain instrument à triturer, du prochain beat à lancer, du regard langoureux à jeter, son pied à l’affût du déclencheur de la grosse caisse qu’il actionne toujours au moment opportun. La tension monte, les corps et les esprits se libèrent, Rebotini en remet une couche et nous fait grimper encore un peu plus haut.

On aurait pu simplement conclure : "c’était vraiment très bien !", mais c’eut été un peu court pour résumer ces 3 jours. Une nouvelle saison envolée, des mélodies plein la tête, des images d’installations musicales dans des lieux insolites, des labels indés passionnés de musiques, des rencontres, des sourires, voilà ce que l’on retiendra des Rockos 2018. Et puis ce temps qui s’étire et permet de mieux profiter des découvertes, de laisser la curiosité s’installer, sans précipitation, de parler, de se dire pourquoi pas et même whouahou !

Photos par FLK (sauf DJ Rivoal par PAR).




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