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Une fois n’est pas coutume, je vais jeter les dés et me lancer dans la chronique d’un groupe d’ici, de chez moi, de Madrid. Je ne suis pas le plus inspiré par l’underground et le rock ibérique, je connais la superficie, les grosses machines, mais je ne cours pas les salles ni sombre dans les revues et fanzines du genre, parfois je découvre, bien sur, l’effet des réseaux sociaux permet de découvrir sans chercher, et parfois surgissent des choses qui accrochent, rarement, mais ad vitam aeternam. Je fais cette chronique mu par l’idée d’avoir trouvé un son qui vaut la peine d’être cité, annoncé et si il le faut, crié. Après tout, nous ne sommes pas que des passeurs, des défricheurs, nous sommes aussi des dénicheurs, des Indiana Jones bohèmes avec des besoins obsessifs de soubresauts. Nous avons tous, dans ce milieu, des amis qui ont un groupe, logique amiable, mais depuis que je vis en Espagne, 23 ans a ce jour, je n’ai fréquenté que très peu de personnages sonores, je suis un être timide et souvent clôt en moi même, relations, très peu. Pourtant cela commence a changer, on croise l’un qui est guitariste (mi compadre Gerardo) et qui, de temps en temps prête son art a un groupe stylé rock espagnol, chaleureux et festif, de ceux qui aiment se faire plaisir en public (Sal de mi vida, pour les nommer, quelle patchanga amigos), et dont l’un des guitariste, Pablo Solana lors d’un concert auquel j’assiste, s’offre un hommage humble et fraternel au récent défunt Tom Petty. Pablo, charismatique sous sa casquette, donne déjà une idée d’un truc différent, d’un intérêt, vous savez bien, ces gens qui attirent l’œil, qui disent déjà plus qu’il ne semble, qui ont cette chose magique qui provoque le pistage. L’oreille et l’œil se tendent sur les réseaux, on suit de loin mais sans perdre de vue. Et puis apparait ce que l’on savait qui devait apparaitre, un disque du monsieur et de son autre groupe dont il est le leader, le nommé The Taxi Talk, et là, on devine, en creusant vidéos et entrevues, que le type n’est pas que ça, collectionneur de guitare, virevolter de ciné, passionné des sons anglo-saxons et surtout, grand artiste musical au sens général de compo, chant, présence, idéal et visionnaire. On dit avec un peu de recul que bon, ne nous hâtons pas, écoutons, que les boys next doors sont pas si communs que ça, que ce n’est peut être pas assez pour en parler au niveau international, que ce serait trop merveilleux, mais sera-t-on objectif, traiterons-nous ce petit phénomène personnel comme il se doit, et outre-Pyrénées, comment aimeront-ils ou pas ce groupe. Mais le disque est là " A quantum tale", acheté le soir de la présentation, après un concert bon-enfant devant une centaine de fans, l’artwork simple et efficace, l’objet mis en place pour l’écoute, on redécouvre ce que le live a laisser dans nos boites crâniennes (la bière, sachez-le, fait des distorsions au son, au bout de cinq-six). Durant le concert, on avait vu ce léger nerf des premiers pas du projet, mais aussi l’aplomb et la joie des membres, ce brio de débuter quelque chose en quoi l’on croit, la foi d’aimer ce qui c’est créer, et l’intelligence d’être conscient de n’en être qu’au principe et que la fin arrivera ou pas, le chemin, est long, très long, peut être le feu s’éteindra, peut être il sera incendie, pour l’instant, la passion maintien la flamme au plus vif. Le jour suivant a cette nuit, je me proposé d’entrer un peu plus dans ce groupe, l’idée déjà germinante d’écrire sur eux, comme sur ces centaines de petits groupes qui cherchent désespérément à se faire voir et écouter, dont la plupart valent le coup, mais n’ont pas l’écho, ou, souvent, la chance. Et ce disque est bon, dans le sens de bénéfique, transmettant une paix, un réel plaisir d’écoute, comme ces plaisirs simples qu’on éprouve en écoutant Lightning seeds, Travis, James, Tom Petty, Snow patrol, Rem, etc...Etc... et même, pour quelqu’un qui n’est pas fan, des omniprésents Beatles, de ces trucs légers qui viennent vous laver les oreilles de sons trop pompeux, ou trop expérimentaux, ou trop costauds, ou trop habituels, ou trop que sais-je encore... Ils sont nécessaires, ces groupes de prétentions câlines et simples, douces, humaines quoi. J’avais passé la matinée a écouter ces ballades un peu honteuses, les Korgis, les Connels, Bruce Hornby, ces chansons dont le poids ne se ressent que chaque dix ans, quand elles reviennent et qu’on a oublié aucune parole, étrangement, ces gravures inconscientes, car on parlera toujours des Springsteen, des Hendrix, des U2, mais on chantera trente ans plus tard Mr Mister (et pire). Ceci est l’effet qui s’est imprimé sur ce "A quantum tale", un truc qui va rester en arrière, mais ne s’oubliera jamais, et que si le besoin en est, on chantonnera pour sourire à nouveau. J’ai mis des raisins dans un bol d’eau a porté de main, j’ai changé la cartouche d’encre et pris mon carnet a l’effigie de Bowie (ceci plaira a Pablo), et puis j’ai étiré les jambes, les pieds sur la tables, relax, calme, dans cet état d’âme propice a passer du bon temps coute que coute, le corps léger, comme il se doit, aux festins, il faut arriver vidé de tout. Le plus surprenant de ce disque, c’est sa lumière tout a fait particulière, ces lumières d’Octobre ou d’Avril, qui réchauffe avant les froids, qui teint tout d’un brin de bleu mélangé a l’ocre, une clarté d’équinoxe, pas de solstice, un instant au milieu des extrêmes, le juste milieu des choses, mais une clarté unique, chaleureuse sans brulure, et sage, sans engelure. Surprenant tous ces sentiments qui s’estompent dans une moment, une surface lisse où se promènent les sens sans chamboulement, les reliefs sont limés, les pics ne blessent plus, les creux ne sont plus des malaises, on flotte sur l’accalmie du monde, et, c’est réellement bon, impressionnant de nécessité, ne se sentir peser, ne se sentir fatigué, ni enragé, ni irrité, ni même embrasé, se sentir juste là, un point dans un ensemble de points. Il est bénéfique, croyez-moi, ne plus rien éprouver que la musique, l’histoire des paroles, et ne pas chercher de guerres, d’exceptionnel, d’invraisemblable, d’unique. Dans les spirales hypnotiques de ce disque se trouve un bric a brac bien organisé de styles, parfois la Jamaïque, parfois Liverpool, Manchester, Nebraska, Buenos Aires, et le Berlin de David et Iggy, des cartes piochées dans tous les jeux mais mises sur la même table de jeu, acidulées au même arome, emmitouflées dans l’esprit Taxi Talk, je répète, il ne s’agit pas ici de créer le nouveau mouvement musical du siècle, sinon de se servir de l’histoire récente pour en extraire le bienêtre, le propos est de donner envie de planer, flotter, la paix, le cool. Le plaisir n’est pas toujours une invention, parfois elle est un rétroviseur et parfois une nouvelle utilité, pas un plagiat, un prêt sonore que l’oreille reconnait dans le fond et qu’autorisent les grands noms aux petits derniers, il s’agit d’aimer, sans demander plus que ce que l’amour a pour richesse, le bonheur. Pablo et acolytes ont sans doute le désir de grands horizons, et pour moi ils en ont le gabarit, mais cet état où ils volent est déjà un niveau acquis et honnête, leur musique et leurs mots ont déjà une plus value, quelque chose qui les différencie des ambitieux sans horizons, la joie de jouer, je n’en demande pas plus d’eux, après, ils iront jusqu’où ils voudront. J’aime, j’apprécie ce travail musical, j’avoue même avoir une passion débordante pour "Astronomer" et son refrain hante ma bouche, très Lennon et McCartney. Certes, ce rock, légèrement folk, légèrement pop, selon la chanson a des rumeurs de temps passés, mais justement, d’un temps passé mais pas achevé, encore en cours, de cette Old school qu’ont engendré les Simon and Garfunkel d’exquises compos et poursuivis ensuite par les petits maitres, Morrissey, Belle and Sébastian, The appartments, Divine Comedy et tant de groupuscules charmant et diversifié, The taxi talk est une branche de cet arbre généalogique sans soucis, sans stress, croissant dans l’observation de la beauté des choses simples. Alors a vous de vous offrir un laps de temps suspendu a rien, un espace bleu entre les nuages, un moment d’évacuation des surplus, et laissez vous câliner par une main tout a fait humaine, tranquille, humble, et talentueuse.




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