> Critiques > Labellisés



J’ai pourtant levé l’oreille comme on lève le pied de l’accélérateur, je m’étais dit qu’il fallait faire une pause parce que le crâne, messieurs dames, c’est un espace réduit qui a très peu d’élasticité, qu’il faut comme tout bon ordinateur vider la poubelle, actualiser, faire de la place dans le disque dur et repartir de plus belle. Je me suis dit "joue-la cool jusqu’après les fêtes" et puis faut aussi nourrir le frigo pour qu’il se porte bien et gagner les soussous suffisant pour éviter la dysenterie et autres faiblesses. Le problème, c’est que même en fermant les volets la lumière passe, même les feuilles closes, l’art traverse. Il y a du boulot en retard, des tas de bons trucs qui font chair de poule et pieds fous, faut reprendre le Bic et se remettre à écouter des joyaux sur les ondes d’internet. Pour Paranoid, ça a été facile a décider, je n’ai pas encore oublié l’effet que leur dernier disque m’avait provoqué, j’en avais fait des phrases et des phrases, insuffisantes encore a mon gout pour exprimer les sensations perçues a cette époque, alors en leur honneur, je prends une page blanche, je suis de retour. Le groupe lillois Paranoid revient jouer dans la cours des grands dans cet Ep. "Playground". Je me souviens avoir était séduit en 2013 par ce "Anytime" qui ouvrait le bal et me faisait prendre la plume pour parler d’un genre dont je ne suis pas le plus fervent défenseur, ce rock grunge issu des nineties. Tout aussi forte est l’entrée dans cette cours de récré ou l’enfance attaque et mord, "Playground", qui donne nom a ce disque, est , pour ceux qui ne sont pas puristes dans ces domaines garage, la meilleure manière de s’enduire de l’essence du groupe avant d’approcher la flamme, morceau luxueux de voix étouffée, comme prisonnière de l’envie, guitares impatientes mais retenues pour mieux exploser, rythmique entrainante, ça sent la colère avalée, ça sent la poudre, le son étudié au pied de la lettre, la mélodie juste pour que le chaos soit mouvement. Ensuite, on est prêt à tout recevoir en plein visage, l’onde de choc. "Till the morning after" est tout a fait sale de la voix aux compressions, combustion soudaine, liberté des rages, oh, ce sont des riffs déjà connus, oh, ce sont des batteries déjà bataillées, oh c’est une voix rayée comme tant d’autres dans ce style, il y a du Green Day basculé dans la folie des Pixies, il y a du Metallica imbibé d’acides, tout est chaotiquement parfait. "Squeleton key" a une base certes plus blues qui tourne vite dans la même direction, il s’agit ici de se battre, de gagner des galons dans la cours de récré, cela ne se fait pas en souriant, cela ce fait de poing et de territoires. "Barbed wire" me semble plus intelligente, son rythme bouscule, l’"Anarchy in the baguette", une partie plus importante des instrument et la voix qui avoue la souffrance en arrière, grunge, certes, mais si bien pensé, oui, du grunge intelligent, j’appellerai ce style rock, les larsens, les désordres, les puissances et les gueulantes, oui, rock est un terme qui colle a ce titre plus qu’aux autres. Je retrouve cette basse obsessive que je citais déjà dans le premier opus de Paranoid comme une déflagration des Killing Jokes (pères punks du grunge), sur cet étrange "Lynn & her northern dark mountains", des regains de Kurt dans les lâchetés de la voix, et un son compact qui la couvre comme un linceul de plomb, l’hypnose de cette basse qui transperce les chairs, et emporte jusqu’à l’explosion ce disque court, trop court pour s’y recréer, oui, l’envie de plus est là, comme en 2013, on remet ça, on en reveux. Non, je ne suis pas le plus studieux en matière rock dur, Nirvana, Soundgarden, je reste plutôt en surface, ce qui rend plus intense et attractif mon plaisir a l’écoute de Paranoid, ce "Mais pourquoi j’écoute ça" qui répond déjà a cette question, là où c’est bien, c’est forcement bon.




 autres albums


 interviews


 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.